L'histoire :
Antonio va rendre visite à sa mère en fin de vie. Elle est couchée dans son lit d’Hôpital, son bras droit est criblé de cicatrices provoquées par les cathéters. Inquiet, il interroge une infirmière : « On ne peut pas lui mettre dans l'autre bras ? ». La blouse blanche lui répond que le bras gauche ne peut pas être bougé. Il est en quelque sorte paralysé à l'équerre et que cette infirmité est ancienne. Le fils est abasourdi, il ne l'avait jamais remarqué. En repartant, assis au volant de sa voiture, il reste sous le choc. Jamais de sa vie, il n'avait soupçonné l'invalidité de sa mère. Comment a-t-il pu passer toute sa vie durant à côté d'un tel handicap ? Elle avait toujours le bras replié, mais elle s'adaptait sans cesse et accomplissait les tâches quotidiennes sans que personne ne soupçonne rien. Si Antonio était passé à côté de cela, cela signifiait aussi qu'il ignorait bien des choses de la vie de sa mère, désormais sur le point de s'achever...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
L'Art de voler a été un succès international. Avec ce roman graphique qui retraçait fidèlement l'histoire de son père, Antonio Altarriba lui rendait un hommage émouvant et remettait aussi en perspective l'Histoire de l'Espagne. La vie familiale devenait le moyen de traverser un XXème siècle marqué pour la péninsule ibérique par la misère, la guerre civile et le fascisme de Franco. A l'occasion d'une de ses nombreuses rencontres avec le public, une question a fait choc chez l'auteur : « Et votre mère ? » Selon ses propres dires, qu'il nous livre en postface, c'est à ce moment qu'il se rendit compte qu'il avait commis une injustice narrative, induite par sa propre ignorance. Le portrait de Petra s'imposait. Elle ne se réduisait pas à un faire-valoir de son père. La société de l'époque avait assigné les femmes à un rang et des fonctions familiales strictes. Mais avant que sa mère ne devienne une mère courage, elle fut d'abord un enfant martyr, dont la mère mourut en couche. Son père, fou de rage et de douleur, tenta alors de la tuer et lui brisa le bras. Elle survécut, mais son handicap s'avéra définitif. L'histoire de Petra embrasse cette fois aussi celle de l'Espagne rurale et franquiste, celle des mœurs d'une dictature militaire qui marche main dans la main avec l’Église. Entre tranches de vie et ellipses de temps, l'auteur finit par aborder le thème de la vieillesse, écorchant au passage les hospices tenus par les religieuses. On referme ce livre en se disant qu'Antonio Altarriba a trouvé en Kim le dessinateur parfait pour faire revivre ses parents sur le papier. L'Aile brisé est le livre miroir de L'Art de voler. Tous deux sont liés, délivrant l'histoire inoubliable des parents de Don Altarriba.