L'histoire :
Chaque année depuis 1955, l’hebdomadaire le Journal de Spirou publie un numéro spécial avec de nombreux récits de Noël. La parution de ces numéros spéciaux dans leur forme actuelle est le fruit d’une longue gestation. Jean Dupuis, fondateur des éditions Dupuis et du Journal de Spirou était porté par une foi chrétienne inconditionnelle. Son hebdomadaire était un moyen de transmettre aux plus jeunes des valeurs de fraternité et de partage qui guidaient son existence depuis sa plus tendre enfance. Humaniste et pieux, il était attaché à offrir une protection filiale à ses ouvriers envers lesquels il éprouvait une responsabilité sociale. Cette tradition paternaliste serait toutefois battue en brèche par une génération de dessinateurs apparue à la libération. Ces jeunes talents n’avaient qu’une envie dépoussiérer la société de carcans jugés dépassés. Pourtant, depuis la fin de la guerre, Noël après Noël, ces jeunes trublions avaient sacrifié à la tradition et livré quantité de planches où l’esprit de la Nativité était célébré. Il faudra attendre le début des années 60 pour que certains fassent preuve d’impertinence pour que les récits moraux soient mâtinés d’une rafraîchissante parodie.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le grenier du Journal de Spirou nous ouvre ses portes et offre une sélection des meilleurs récits de Noël publiés entre 1955 et 1969. Les contributions de 29 auteurs prestigieux comme Franquin, Fournier, Roba, Will ou encore Tillieux sont ainsi rassemblées chronologiquement dans cette intégrale de 237 pages. On y retrouve des héros familiers comme le Marsupilami, Bobo, Johan, Pirlouit, Boule et Bill... mais cette récréation était également l’occasion pour certains auteurs de donner vie à d’autres personnages le temps d’un récit. Christelle et Bertrand Pissavy-Yvernault qui ont préfacé ce recueil apportent un éclairage intéressant sur le contexte de l’époque au sein de la rédaction. On apprend notamment que cet exercice rituel du conte de Noël était devenu une contrainte pour une poignée d’auteurs qui souhaitaient s’émanciper des principes moraux de leur éditeur. Même si, pour l’époque, le ton de certaines histoires pouvait être jugé un peu moqueur, la tonalité de l’humour demeure très bon enfant, il n’est jamais déplacé ou offensant. Certaines de ces pépites n’ont été que très rarement rééditées et notamment des contes sans illustration. Au niveau graphique, une majorité des auteurs sont issus de l’école de Marcinelle avec des personnages expressifs, des décors détaillés et des couleurs flamboyantes. Les éditions Dupuis ont préservé au maximum les couleurs, les formats pour avoir un rendu fidèle aux publications d’époque. Les nostalgiques de l’âge d’or de la BD franco-belge seront aux anges.