L'histoire :
Julie se retrouve à la barre du tribunal pour tenter de convaincre les juges de son innocence. Accusée d’homicide, elle est convaincue qu’elle pourra très rapidement serrer son petit Mathias entre ses bras et pourquoi pas s’envoler avec lui en Australie. Devant la cour d’assises, elle raconte son adolescence à Charleroi, entre terrils, famille recomposée peu aimante et amours difficiles avec Théo. Cette jeunesse se brise très rapidement par deux fois : un avortement contraint, puis une dispute avec Théo se terminant par la chute, à travers une fenêtre, de ce dernier et une injonction judiciaire d’éloignement de 2 ans pour la responsable des faits. Julie s’embarque alors sur un paquebot luxueux, déterminée à devenir quelqu’un. Lors d’une croisière, elle devient la maitresse d’Armand, un riche vacancier, qui arrivait à bon port, et lui propose de l’accompagner à Paris : elle jouera 3 à 4 fois par mois l’escort-girl dans des diners raffinés organisés par Armand pour ses gros clients. La vie est presque belle, mais même gracieusement entretenue par son amant, les terrils et le bistrot crade de son grand-père lui manquent terriblement… Théo également : elle retourne dans sa ville natale, les bras chargés de cadeaux et ne tarde pas à tomber dans les bras de son ex petit ami.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En poursuivant de conjuguer narration judicieuse et dessin touchant, Denis Lapière et Olivier Grenson concluent un diptyque captivant de bout en bout. Construit sur une intrigue judiciaire presque classique qui sert d’appât pour mieux nous harponner, le véritable intérêt repose sur le personnage central du récit : Julie, dont le charme envoûtant opère dés notre première plongée dans son regard profond. Une paire d’yeux noisettes qui, à elle seule, invite le lecteur à prendre possession du parcours de la belle accusée : peu importe faits, témoignages, mensonges, le premier battement de cils nous met directement à ses cotés. Ensuite on se laissera guider par la voix off, douce, posée et introspective, qui fait de Julie son premier juge avant que la sentence ne soit prononcée : un voyage intérieure dont l’aboutissement souhaité est un ultime nouveau départ. Au-delà, le scénario, s’il sait admirablement bien entretenir le suspens en raison d’une narration certes linéaire mais régulièrement nourrie de flashbacks, de révélations et judicieusement rythmée, ne réserve honnêtement aucune surprise : du nom, enfin révélé, de la victime, au dénouement, on s’attendait pratiquement à tout. Mais c’est loin d’être l’essentiel : cette histoire presque ordinaire démontre, s’il en était besoin, que le sentiment de désamour ou du besoin d’exister à travers le regard des autres, est un destructeur puissant… Qui mieux qu’Olivier Grenson et la sensibilité de son trait auraient pu nous convier à cette longue empathie : la douceur des traits de sa Julie, la réussite de sa colorisation directe et le soin apporté aux décors sont en grande partie responsable du charme opéré par le récit. Reste juste, pour l’artiste, à fouetter son trait pour lui donner un peu plus de mouvement et atteindre la quasi-perfection...