L'histoire :
A bord du vieux tacot de Paco, Eliane Goldschmidt, jeune linguiste française, rejoint la tribu des Mbyas. Nous sommes en février 1939 à l’aube d’une triste guerre… La jeune insouciante s’apprête à vivre un 3e séjour au cœur de cette tribu paraguayenne. Les Mbyas lui réservent un accueil froid mais c’est la coutume qui veut qu’on ignore l’invité qui s’installe. Celle que les indiens ont surnommé Napagnouma, « la femme blanche qui fait pleurer son bâton », se sent proche de ce peuple primitif. Elle souhaite à tout prix coucher sur son cahier à spirale leurs mots, qu’elle attrape comme un chasseur de papillons pour éviter qu’ils ne sombrent dans l’oubli. Mais ce nouveau séjour est différent. Eliane sent que le vent tourne. Ses amis ont changé. Ils négligent leurs terres, les leurs et se laissent inexorablement dépérir. Quelque chose se prépare. En Europe aussi… La guerre éclate mais la jeune scientifique l’ignore. Un matin, elle prend soudainement peur lorsqu’elle aperçoit les femmes en transe se lacérant en un rite de purification. Les urnes funéraires sont sorties, le village décoré. Ces préparatifs annoncent l’arrivée du Karaï, l’Homme-Dieu, le dernier… L’Homme-Médecine les guidera d’est en ouest à la recherche de « La Terre sans Mal », paradis légendaire, la seule capable d’accueillir un peuple qui s’éteint. Malgré eux, Eliane-Napagnouma les accompagnera…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Pour commémorer les 20 ans d’Aire Libre, José Louis Bocquet, nouveau directeur de cette sublime collection, a eu une chouette idée : associer tout au long de l’année la parution de nouveaux ouvrages (10), à la réédition d’albums emblématiques (10) un peu oubliés. Or parmi les piliers du 9e art, La Terre sans Mal est en bonne place. Une bonne occasion de nous replonger dans une œuvre qui allait en particulier faire basculer la vie de l’un de ses auteurs : Emmanuel Lepage. L’impressionnant succès de l’ouvrage lui assura en effet une agréable stabilité financière et un carnet de commande bien rempli. Outre ces digressions, la Terre sans Mal est avant tout l’association d’un récit puissant et d’un dessin magique. Très habilement, Anne Sibran nous balade entre quête utopique et réalité cruelle. La proximité grandissante de la condition de son héroïne avec la peuplade primitive tout au long du récit est particulièrement poignante. De mystique, la quête devient vite identitaire, le tout avec finesse et violence. De son coté, Emmanuel Lepage nous fait profiter avec bonheur du changement de cap que prend son art, cet ouvrage marquant son passage à la couleur directe. Sans pour autant tomber dans l’illustration, ses aquarelles nous plongent plus que facilement au cœur de la luxuriance et de la moiteur tropicales. Et puis cette manière de croquer les femmes… Soyez francs, vous aussi êtes tombés sous le charme ?