L'histoire :
Le Belliqueux est un immense bateau de la marine nationale. Etudiant en océanographie, Georges Guilbert a été affecté sur le cuirassé en qualité de timonier. Il paraît que le bateau est « un vieux rafiot toujours en panne »... Guilbert découvre la bête sur le port de Brest : immense, complexe... Une fois à l'intérieur, il ressemble à un labyrinthe géant que seuls les plus expérimentés sauront apprivoiser. Très vite, il fait la connaissance des autres matelots : Louis Blinault, écrivain de métier, et le bosco Nordiz. Puis il découvre les conditions de vie à bord : chaleur étouffante, obscurité inquiétante, odeurs infernales... Et en guise de passage obligé, le fameux mal de mer. Curieux, les trois hommes vont vite se retrouver dans les salles des machines, face au cœur du bateau : le réducteur de vitesse, sorte d'engrenage ou de pièce mécanique, essentiel au fonctionnement du moteur. Un seul défaut technique et c'est la catastrophe... Peu à peu, isolés et perdus, les trois personnages vont disparaître dans les entrailles de ce Goliath des mers... Leurs supérieurs croient à une désertion et même à un complot, tandis que le cuirassé est cerné par un sous-marin suspect...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Tiré d'une expérience personnelle de l'auteur, Le Réducteur de vitesse conte les mésaventures de trois matelots – Guilbert, Blinault et Nordiz – plongés dans les entrailles d'un navire de guerre, Le Belliqueux. Pour avoir fait son service militaire dans la marine nationale, Christophe Blain a rencontré des gens et bien connu les conditions de vie et de travail à bord de ces paquebots. A l'époque, il consigne ses impressions dans des notes, des croquis, des crayonnés. De cette matière, il en a extrait un récit fantasmagorique narrant les errances de marins maladroits au cœur d'un château des mers : chaleur, obscurité, odeurs, ennui, fatigue, peur d'une guerre imminente, Blain décrit la vie à bord puis lui ajoute une intrigue en forme de descente aux enfers, dans les méandres insondables de cette grande carcasse de fer aux mille recoins. Dépassés, affolés, les matelots s'y perdent, leur supérieurs croient à la trahison et le final ne peut être que dramatique. Au centre de l'imbroglio, le réducteur de vitesse, la pièce centrale, l'engrenage qui ne doit souffrir aucun défaut technique, le plus minime soit-il (même un taille crayon !) sous peine de mettre à mal tout le fonctionnement normal de la machine. Ici la chronique sociale croise le documentaire et l'aventure, pour s'achever dans un thriller à la fois comique et inquiétant. A l'image de l'oeuvre de David B., en moins poussé toutefois, Blain explique avoir voulu se détacher de tout réalisme, pour lui préférer une approche fantastique. D'où un bateau aux dimensions exagérées, une impression de gigantisme permanente, les personnages ressemblant à des mini-pouces. Le réalisme, lui, vient de dialogues qui sonnent juste, du parler marin et de personnages typés, raccords avec les représentations traditionnelles. Graphiquement, Blain fit le choix de la partition allusive et caricaturale en couleurs vives, rehaussé d'aplats, pour suggérer l'atmosphère souvent obscure et angoissante, voire claustrophobe, d'un intérieur de bateau. Parue en 1999 et inspirée de faits réels, la BD n'a rien perdu de sa force descriptive. Une réédition à ne pas manquer pour les retardataires...