L'histoire :
Viny n’est guère exalté par l’inspiration émanant de ses collègues en conférence de rédaction. Il s’échappe discrètement de l’immeuble, va acheter un sachet de dope chez son dealer et rentre chez lui pour se faire une piquouze en écoutant du Bob Dylan. Le lendemain, devant les remontrances de son boss qui a retrouvé son matos planqué dans les chiottes de la rédac’, il est bien obligé de choisir un sujet à couvrir : ce sera la disparition d’un magicien people, Pipo Germano Latino. Mais avant cela, un petit tour par une réunion des narcotiques anonymes lui permet de croiser une femme à la recherche de sa fille. La jolie Lolita fréquentait ces réunions de narco-dépendants et elle aussi a disparu. Viny lui propose gracieusement d’enquêter. Ses recherches commencent dans la chambre de la jeune femme. Il découvre sans surprise que celle-ci s’était passionnée pour le bouddhisme. Il trouve aussi une cachette avec du matos de toxico et une cassette VHS. La VHS contient un reportage sur un gourou indien, Osha, qui étaye sa pensée à partir d’allégories philosophico-grivoises. Viny est à la fois atterré et captivé. Il poursuit son enquête dans un cabaret, en rendant une petite visite dans la coulisse au magicien Magic Babu…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cette « Stupéfiante » (il y a un double sens) aventure de Viny K assène un coup de pied enthousiasmant dans la fourmilière de la BD pré-formatée à-la-papa. Classiquement reporter de profession, notre héros se lance en effet dans une aventure-enquête infiniment plus adulte et contemporaine que son modèle Tintin. Viny fiche en effet des coups de tatanes dans les roubignoles, tente de soigner son addiction à l’héro, n’a rien contre la gaudriole et il plonge surtout tête la première dans les milieux porno-sectaires hindoux… Il est ce qu’on appelle un « journaliste gonzo ». Cela ne l’empêche pas de se livrer à des courses-poursuites épiques et à tourner les situations en dérision. Car le scénariste Vincent Bernière joue aussi d’une large palette d’humour, notamment au travers des histoires croustillantes du gourou ou du comique de répétition. Ajoutez à cela une narration percutante et directe, qui focalise tantôt sur les détails prolixes, et laisse tantôt s’exprimer longuement la narration purement graphique d'Erwan Terrier. Son dessin aux traits épais est en adéquation de la modernité de ton : semi-réaliste, toujours juste et appliqué. On remarque aussi au passage que le multi-casquettes Bernière – éditeur d’Outsider pour Delcourt, scénariste pour Aire libre – fait de la toxicomanie une de ses thématiques favorites (Le château des ruisseaux). Drôle, mature, original, rythmé : ce (premier ?) opus dispose de beaucoup d’attributs pour séduire un large public (adulte). Il n’est pas dit que la méthode décapante puisse s’appliquer sur une série au long cours… mais en tout cas, on l’espère !
