L'histoire :
En octobre 1861, un chaman creek alerte sa tribu sur l’attaque imminente de l’artillerie confédérée, aidée par les cherokees. Les creeks sont restés fidèles à l’Union, il faut les punir ! C’est un massacre. Quelques jours plus tard, le sergent Chesterfield des « tuniques bleues » sonne une énième charge de cavalerie sur leurs ennemis des « tuniques grises ». Il remplace en effet capitaine Stark, qui est sanglé sur un brancard. Ce dernier a semble-t-il définitivement perdu la boule à force de charger. Or Chesterfield file lui aussi le même mauvais coton ! Le moindre bruit le met en alerte, le pousse à dégainer. Il devient dangereux pour ses propres rangs, malgré les tentatives de Blutch pour l’apaiser. Une nuit, son surmenage déborde : il fait un cauchemar et se met à courir dans le camp, sabre à la main, en criant « Chaaargeez ! ». Les médecins diagnostiquent un syndrome du soldat exposé à la violence et à la mort. Il lui faut du repos, il doit être éloigné du front. Or au moment même de cette préconisation, un cartographe nommé Clure se pointe à la porte de l’Etat-Major. Clure présente une lettre de mission, exigeant une escorte pour son travail de géographe en milieu indien hostile. Blutch et Chesterfield constituent évidemment l’escorte idéale. Et Chesterfield accepte d’autant plus facilement que le territoire couvert leur permet de passer par le fort Cow, où il pourra revoir Amélie Appeltown. Les voilà donc partis au côté de Clure, qui s’avère être un ardent anarchiste…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Du feu sur la glace constitue le deuxième épisode des Tuniques bleues sous l’ère Kris. Le scénariste brestois a en effet repris en 2022 le flambeau de ce classique co-créé par Raoul Cauvin. C’est néanmoins toujours Willy Lambil qui dessine, du haut de ses 87 ans ! Malgré l’immense talent du dessinateur belge, il faut reconnaître à ses planches un trait qui devient parfois imprécis, surtout au niveau des automatismes sur les personnages (visages aplatis, parfois difficile à reconnaître de loin). Lambil se fend cependant toujours de quelques jolies cases animées et pleine largeur (les charges de cavalerie, les champs de batailles, les transhumances indiennes, les panoramiques sur les camps…). Côté scénario, à travers le personnage anarchiste et pacifique de Clure, Kris propose une réflexion sur la guerre ; après tout, c’est bien le cœur du sujet ! Et il en profite pour inverser astucieusement les rôles : en plein burn-out, Chesterfield prend du recul sur son tempérament va-t-en-guerre habituel et préfère s’adonner à la peinture (la dernière réplique est une pépite). Cela se fait au détriment de Blutch, circonspect de ne plus pouvoir exercer son rôle de fumiste et d’antimilitariste. Cette dimension est plus subtile que le final rocambolesque sur la glace et le feu, prétexte au titre. On note aussi un surprenant renaming de l’enceinte militaire dirigée par le colonel Appeltown : Fort Bow est devenu un nouveau fort en construction, Fort Cow.