L'histoire :
Une fois de plus, le sergent Chesterfield recherche son ami tire-au-flanc Blutch, pour mener une nouvelle charge de cavalerie sur le front de la guerre de sécession. Il tombe alors en pleine festivités de la Saint Patrick organisées par la communauté des soldats d’origine irlandaise. Son intervention aboutit à la chute d’un cavalier dans un obstacle humide du parcours de steeple-chase. La capitaine Patrick Dougherty – alias Paddy – est cela dit compréhensif et il explique à Chesterfield les particularités de cette fête de Saint Patrick, dont l’accoutrement vert de « leprechaun » symbolise le farfadet. Les deux hommes sympathisent. Paddy est interloqué lorsque Chesterfield lui donne son nom : il recherchait justement son cousin irlandais appelé Cornelius Chesterfield ! Etant donné sa chevelure rousse, il ne fait aucun doute que c’est lui et qu’il est lui aussi d’origine irlandaise ! Le sergent est bouleversé par ces informations sur ses origines… Au point d’en oublier d’enguirlander Blutch quand il le trouve. Paddy invite les deux compères à leur fête du soir. Dans le Shamrock Pub, ils font alors connaissance avec une communauté soudée et très amicale. En ce contexte, les soldats peuvent même appeler leur général par son prénom. Ils boivent de la bière brune en criant « Slancha ! », ils chantent gaiement des chansons tristes et dansent toute la nuit…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce 66ème épisode des Tuniques Bleues est le premier réalisé par le duo Kris-Lambil. Raoul Cauvin est en effet décédé en août 2021, mais à 85 ans, Lambil est toujours présent pour une charge de cavalerie ! Kris fournit ici une transition bien dans le ton. Il assure à la fois les engueulades attendues entre Blutch et Chesterfiled ; et il s’appuie sur une dimension culturelle, comme le faisait souvent Cauvin. Cette fois, les lecteurs partiront à la découverte de la communauté irlandaise, soudée et nombreuse en ce milieu de XIXème siècle qui ouvrit ses portes à bien des émigrations d’Europe vers les USA. La Saint Patrick, la stout brune, l’habit de leprechaun (farfadet) vert, les danses folkloriques, les chansons tristes chantées gaiement… Le scénariste ajoute même une pierre au passé de Chesterfield en lui offrant de potentielles origines irlandaises, en parfaite cohérence avec sa chevelure rousse pétard. La dénonciation de l’absurdité de la guerre, qui pousse des cousins irlandais à se confronter de chaque côté des belligérants, est également de mise. Malgré un trait par moment hésitant (sur les personnages lorsqu’ils sont en arrière-plans et les papotages secondaires), le dessin de Lambil offre quant à lui de jolies et inédites scènes (les ponts de Fredericksburg, Stark qui se jette à l’eau avec son cheval, les danses folkloriques…).