L'histoire :
Le général Grant réclame des renforts pour le siège de la ville de Petersburg. En effet, les confédérés ont placé des batteries de canons sur les hauteurs et leur usage ruine tout assaut des tuniques bleues, leur infligeant des pertes considérables. Or les deux seuls soldats valides au sein du 22ème de cavalerie sont… le caporal Blutch et le sergent Chesterfield ! Voilà donc les deux compères envoyés par Alexander, qui se présentent devant Grant. Ce dernier hallucine de ne voir que deux trouffions se présenter en guise de « renforts humains »… Mais il est rapidement accaparé par l’idée originale d’un lieutenant-colonel, un certain Henry Pleasants. Ce dernier propose en effet que les yankee creusent une longue galerie de 200 mètres, pour arriver juste au-dessous des positions des confédérés… et d’y placer une puissante charge explosive qui réduira leur artillerie en miettes. Cette idée est retenue et Pleasants se transforme en véritable tyran auprès des hommes qui, tantôt creusent, tantôt doivent partir en quête de planches de bois pour étayer la galerie. Deux factions se relaient pour ce labeur : une composée exclusivement de blancs, une autre exclusivement de noirs. Car les deux groupes sont animés par un racisme réciproque qui les empêche de travailler ensemble…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les octogénaires Raoul Cauvin et Willy Lambil sont toujours fidèles au poste, à l’image de leurs héros yankee Chesterfield et Blutch. Avec Ric Hochet, Chick Bill, Michel Vaillant, Bob Morane, Lucky Luke et les indétrônables Bob et Bobette, Les tuniques bleues sont assurément l’une des séries BD les plus prolifiques, en nombre d’albums… mais surtout la dernière à être toujours réalisée par ses auteurs ! Voilà donc nos héros partis prêter main-forte au général Grant, futur président des USA, dans le but de creuser une improbable galerie sous les hauteurs de Petersburg, l’une des célèbres batailles de la guerre de sécession. Le fourbe objectif est de faire exploser l’artillerie ennemie par-dessous elle. A priori l’anecdote guerrière est authentique, bien qu’ici fortement romancée par Cauvin. Cette occupation terrière permet aux deux compères de se livrer à leurs engueulades et tentatives de rebellions typiques. Quoique sur ce plan, la narration de Cauvin cabotine dans les grandes largeurs. Bizarrement, l’aventure se déporte sur un tout autre sujet que la réalisation technique du tunnel – on ne les voit jamais évacuer la terre, par exemple ! Blutch et Chesterfield sont en effet soumis à la tyrannie lunatique d’un lieutenant-colonel ; et ils subissent le racisme ordinaire des troupes, qui oblige deux groupes de couleurs de peaux différentes à se relayer, plutôt que de travailler de concert. C’est l’occasion de rappeler à travers les dialogues que l’émancipation des esclaves noirs était avant tout un prétexte pour les nordistes, d’annihiler le modèle économique sudiste. Dommage que cette question majeure, enfin abordée dans les Tuniques bleues, vienne en dérivé quelque peu artificiel et gratuit, d’une autre problématique.