L'histoire :
L’hiver 1942, dans la ville de Stalingrad en ruine, les combats font rage entre les soldats du IIIe Reich et les armées soviétiques de Staline. Deux hommes zigzaguent au milieu des explosions et des tirs de snipers. Le commissaire du peuple Kazimir escorte le jeune cinéaste Yaroslav jusqu’à un abri, où il doit lui présenter ses collaborateurs Igor et Simon. Un film de propagande à la gloire des armées soviétiques lui a en effet été commandé. En tant que cinéaste, Yaroslav est médiocre et inconnu, mais a été pistonné pour ce projet : son oncle est le redouté procureur Vichinski. Le jeune homme nourrit de terribles angoisses à l’idée de devoir filmer en première ligne. Un petit coup de vodka de temps en temps permet de se donner du courage. Toutefois, quand son regard se pose sur Simon, une animosité d’origine inconnue l’envahit : il connaît cette tête et ne la porte pas dans son cœur… mais pourquoi ? En outre, dans ce climat infernal et frigorifique de la bataille, où chacun porte moult suspicions envers son prochain, la rigueur budgétaire également de mise. La moindre bobine de film est ultra précieuse…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le scénariste Sylvain Ricard et le dessinateur Franck Bourgeron livrent ici la première partie d’un étonnant diptyque sur fond de seconde guerre mondiale. Les protagonistes sont des soldats soviétiques qui doivent réaliser un film de propagande pro-stalinien sous le feu de la bataille de Stalingrad, l’une des plus longues, dévastatrice et meurtrières du front de l’Est. Dans ce contexte infernal des plus tragiques (les ruines, l’hiver, les balles qui fusent, les explosions), de profondes dissensions se nouent alors entre les membres de l’équipe de tournage. Deux styles graphiques cohabitent sur la majorité des planches : en fond de case, des décors décharnés évoquent la ville à partir de structures, quasiment en ombres chinoises, parfois de simples coups de pinceaux artistiquement brossés ou douchés : ruines carbonisées sur neige blanche. Comme pour une pièce de théâtre, les personnages se superposent sur ce fond dépouillé, pour jouer leurs rôles au premier plan, dans un style de dessin plus caricatural, plus vif et dynamique. Le job de Bourgeron consiste alors à varier les plans, les angles et les distances, pour délivrer les tensions que se voue cette équipe de protagonistes peu sympathiques en son sein. Cet exercice graphique intéressant à part, on peine à saisir pour le moment où les auteurs veulent nous emmener. S’agit-il de s’interroger sur la place de l’artiste dans un régime totalitaire ? De la notion de l’art face au péril de la vie ? De l’entraide et du pardon ? Le propos prendra certainement tout son sens au cours du tome 2 à venir…