L'histoire :
Ce soir, Etienne peut faire la fête : il ne l’a pas ébruité, mais il a dans sa poche un ticket de loto gagnant. 6 bons numéros ! Le pactole ! Invité à une soirée chez un couple d’amis, Lise et Franck, il se saoule logiquement et repart à pied en titubant, suscitant les inquiétudes de ses amis. En effet, il peut en arriver des choses à un ticket de loto, entre le moment où on sait qu’on a gagné et le moment où on empoche effectivement les gains… Tout commence à déraper quand il prend le métro dans le mauvais sens. En bout de rame, bien sûr, le service est terminé… Il est bousculé par des junkies qui lui font les poches et lui piquent son portefeuille sans qu’il s’en rende compte. Un étrange petit homme, un peu morbide, avec une veste trop large pour être honnête, lui propose alors gentiment de l’héberger. A peine couché, dans un château trop glauque, Etienne se relève et se sauve nuitamment. Le voilà de retour chez Lise et Franck, qui le rassurent en lui disant qu’il était parti avec le blouson (et donc le portefeuille) d’un autre. Le lendemain, il se laisse distraire au volant et plonge avec sa voiture dans la Seine. Rien de grave, mais l’hôpital appelle tout de même son ex, Laetitia, via son téléphone portable (la « personne à prévenir en cas d’accident »). Curieusement, Laetitia est plus aimable que lors de leur rupture. Serait-elle au courant pour le ticket ? D’ailleurs, où est-il, ce ticket, qu’Etienne venait de mettre à sécher sur le radiateur ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cette situation de « riche en devenir » est l’occasion pour un trio d’auteurs de plonger leur personnage dans tout un tas de considérations sociales intéressantes. De la convoitise inhérente et inconsciente suscité par un tel aléa ; du sens réel de la chance ; du pouvoir de l’argent à faire ou défaire le bonheur ; de l’équation compliqué entre aisance matérielle et rapports humains… Pourquoi Etienne tarde t-il tant à encaisser son pactole ? Comme sur la couverture, le héros est assis sur un tas d’or qu’il ne se presse pas de sécuriser. Il considère son état, s’en délecte presque, et doit auparavant faire des choix de vie. Cela le perturbe un peu, mais sans le traumatiser. Cette modération s’applique de même à la trame générale de ce one-shot, contenant par touche des zestes de péripéties, de romanesque, d’intrigues policières, sans en faire de trop. Philippe Dupuy et Charles Berberian, célèbre duo du 9e art (et co-présidents du festival d’Angoulême 2009), s’associent cette fois à un troisième auteur renommé, évoluant dans le même registre, Jean-Claude Denis. Difficile de dire qui s’est chargé du dessin – un trait toujours simple, moderne et d’une grande lisibilité – qui du scénario… L’ensemble a été réalisé à 3 mains, avec un traitement graphique plus feutré que d’ordinaire, en raison notamment d’une gestion délicate des ambiances et des couleurs par Ruby. Subtil !