L'histoire :
La jeune Louna vit sur le littoral normand. Elle fait des promenades en solitaire le long des falaises, où elle a parfois le bonheur de trouver des partitions de musique virevoltantes. Elle s’imagine qu’elles ont été emportées par le vent, depuis un grand compositeur du XIXème qui pianotait sur les hauteurs. En rentrant chez elle, elle attrape alors sa flute traversière et s’imagine en soliste au sein d’une formation orchestrale. Parfois, elle rêve aussi qu’elle épate tout le monde en marquant d’incroyables paniers de baskets… Mais en réalité, Louna est très seule, elle ne s’intègre pas aux autres enfants de son âge. Dans un pays africain ravagé par la guerre, Satou est quant à elle une jeune orpheline noire, qui aide comme elle le peut les missions humanitaires. Elle charge et décharge des camions, elle débarrasse les détritus sur les ruines des conflits… et entre deux, elle s’amuse avec son cerf-volant, espérant chaque jour une autre vie plus joyeuse. Elle croise régulièrement un couple de français, qui la prennent en photo et s’attachent à elle…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Il y a deux manières de lire cette BD, « composée » selon la même méthode originale que Billy Symphony et A l’unisson, déjà aux éditions de la Gouttière. La première, à l’ancienne, consiste à la lire dans le silence, en regardant les images permettant de reconstituer un propos bienveillant d’humanisme et de solidarité entre deux fillettes initialement séparées par leurs cultures et leurs pays de naissance. On se doute comme une « évidence » que leurs destins vont converger l’un vers l’autre. Ce scénario empli de bonnes intentions est sans doute un peu mièvre… et « court ». La seconde propose de commencer par se connecter via un QR code (ou via le lien lvd2022hdf.fr) à un site qui diffuse la 7ème symphonie de Beethoven, jouée par l’Orchestre de Picardie. Celle-ci impose dès lors un rythme de lecture, assurément plus lent et contemplatif que ne le fait le lecteur qui a choisi la première méthode. Le site offre une vidéo qui alterne les zooms sur les cases et donne l’idée de ce rythme de lecture approprié. Or 36 minutes de lecture, c’est immensément long pour une BD muette de 46 planches. Le premier mouvement (Vivace) permet de présenter les personnages et leurs spleens intérieurs. Le second mouvement, Alegretto (le plus connu), enfonce le clou de leurs vagues à l’âme respectifs : les fillettes sont très seules, leurs entourages ne sont pas trop adaptés à leurs attentes de vie. Le troisième mouvement, Presto, fait avancer la problématique en diplômant Louna et en accordant une adoption à Satou. Le quatrième mouvement, Allegro con brio, conclut favorablement leur rencontre, qui débouche évidemment sur le début d’une belle histoire d’amitié. Et ça tombe sacrément bien : cette sororité est pile-poil ce qui manquait à leur vie. La belle partition humaine se termine en apothéose. Applaudissements. Cette BD-concept originale, mais au scénario de Dominique Zay certes un peu convenu, est illustrée par un dessin semi-réaliste de toute beauté, signé Damien Cuvillier, avec les jolies couleurs d’Anne-Claire Giraudet.