L'histoire :
Le 28 mars 1757, se déroulait sur la place de Grève parisienne le supplice de Damiens, qui avait attenté à la vie du roi Louis XV. Ce sera le dernier écartèlement légal en France, précédé d’une liste précise de tortures ragoutantes. Trente ans plus tard, c’est la révolution française et ses principes d’équité populaire. Afin que chaque condamné à mort soit exécuté de manière égalitaire, il est préconisé l’invention d’une machine-outil plus en phase avec l’ère du progrès technique. En outre, le gros avantage d’une décapitation mécanique, c’est qu’elle évite les nombreuses imprécisions qui surviennent très souvent lors des décollations manuelles de têtes (tranchage au mauvais endroit ou partiel, donc en plusieurs fois...). Deux médecins des « Lumières » sont chargés de mettre au point cet engin de mort : Guillotin et Louis. L’objectif est de diminuer la souffrance jugée inutile, et de permettre l’immédiateté de la mort. Au terme de plusieurs séances à l’assemblée nationale, le projet de « suppression unique pour tout citoyen français sans distinction aucune » est précisément documenté et entériné le 20 mars 1792, ce sera la « décollation par guillotine ». Cet engin deviendra le référent culturel de la Révolution…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cet ouvrage de vulgarisation historique au titre évocateur n’est pas exactement une bande dessinée, car il n’y a ni narration séquentielle, ni mise en scène, ni personnages récurrents – hormis la guillotine en elle-même. Il demeure néanmoins un bouquin très intéressant. Marie Gloris Bardiaux-Vaïente se livre en fait à une étude poussée et exhaustive – et pour cause : en premier lieu, il s’agit d’un sujet de thèse universitaire – de cet engin de mort particulièrement utilisé sous la Terreur. Comment exécutait-on avant la guillotine ? Pourquoi l’avoir créée ? Qui l’a créée ? A partir de quelles inspirations ? Selon quels procédés techniques ? Comment l’a-t-on perfectionnée pour éviter les « incidents » ? Comment meurt-on exactement quand on la subit ? Quel processus intellectuel et social a permis d’en finir avec elle ? Pas un seul paramètre ne semble manquer à cet exposé magistral. Et malgré sa morbidité apparente, la manière d’approcher la chose se révèle particulièrement instructive pour remettre le principe social, philosophie ou éthique, ainsi que les techniques de la peine capitale dans chacune de ses époques. Du reste, le dessinateur Rica, qui a la charge d’illustrer chaque dimension du sujet dans un noir et blanc de circonstance, le fait avec inventivité, précision et beaucoup de talent. Il alterne le réalisme, les schémas et la caricature, et ne se prive pas non plus d’insister sur les aspects ignobles du procédé (ex : les ratés), avec force giclées d’hémoglobine et grimaces des « patients », non par sadisme déplacé, mais dans un souci de précision et de pédagogie. Telle était aussi la guillotine : un procédé absolutiste et radical de finition de vie, qui ne souffre d’aucun sentimentalisme.