L'histoire :
Il y a plus de 20 000 ans, la grotte Cosquer (aujourd’hui dans le parc naturel des Calanques) n’était pas encore immergée. Un vieil homme en fait la visite à un jeune homme, lui dévoilant à la lueur d’une lampe à huile les nombreux dessins pariétaux. Il lui raconte alors une histoire qui s’est déroulée 15 ans plus tôt. Le jeune Wu remonte alors en solitaire, vers le Nord, le long de la côte Atlantique. Il va de tribu en tribu, leur apportant le savoir et les techniques qu’il a accumulés au gré de ses nombreuses expériences. Perturbé dans son cheminement par la barrière naturelle de la rivière Charente, il s’enfonce dans les terres, jusqu’aux hauts plateaux d’Angoulême. C’est alors qu’il est agressé par deux chasseurs qui n’apprécient pas de voir un inconnu sur leur territoire. Acculé au fond d’un défilé, il cache sa précieuse besace et évite de peu un javelot. En guise de défense, il jette un caillou dans un amoncellement de pierres et… provoque un effondrement ! Ses ennemis sont recouverts et lui s’en tire miraculeusement, quoique blessé à la jambe. Il parvient néanmoins à ramper jusqu’à l’extérieur du défilé, tandis qu’une averse de neige commence. C’est là que les chasseurs d’une tribu proche le découvrent inconscient et le ramènent à leur tipi pour le soigner.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
A travers ce one-shot, les charentaises éditions Eidola font un lointain bond dans le passé de leur région, à partir des éléments trouvés dans des vestiges locaux. Le scénario de Jean-François Chanson parvient admirablement à allier l’aventure épique, la tragédie shakespearienne, la dimension romantique et les informations didactiques. Et rien que pour cette formule très difficile à équilibrer, cet album vaut le détour. Nous voici donc sous la préhistoire, il y a 20 000 ans, aux côtés d’un jeune homme digne du plus célèbre des héros préhistoriques en BD, Rahan, fils des âges farouches. A la différence de ce dernier, le jeune héros Wu ne se balade pas en slip, et c’est parce que notre histoire se déroule en hiver et qu’il est donc plus que nécessaire de porter des fourrures. En revanche, Wu a la même vocation de transmission à ses pairs du savoir accumulé, de celles qui font progresser l’humanité, quand bien même il intervient pour résoudre une rivalité inter-tribus. Cette belle ambition est mise en scène et dessinée selon une griffe semi-réaliste fort agréable et régulière par Juliette Vaast, de manière bien plus plausible que dans Rahan. C’est l’occasion d’assister in situ à l’utilisation du propulseur à sagaies, de l’aiguille à chas, du silex taillé pour dépecer les bêtes… Les auteurs se basent sur les découvertes authentiques de différents sites datant du solutréen, de la célèbre grotte Cosquer aujourd’hui immergée au large de Cassis, à Roc-de-Sers et la Combe-à-Rolland, proches d’Angoulême et célèbres pour leurs peintures pariétales. Tout cela se met en place à travers le destin tragique d’une jeune femme, Pao, qui porte un étrange symbole tatoué sur le front. Ce signe appelé « aviforme » par les scientifiques a authentiquement été retrouvé peint à Lascaux et Cougnac. Comme hypothèse de départ, les auteurs posent la question : ce symbole pourrait-il l’œuvre du même artiste, qui l’aurait reproduit en différents lieux séparés par de longues distances ? La préhistoire est encore le nid de tous les possibles, une aventure dingue !