L'histoire :
Un après-midi nuageux à la gare Saint-Lazare. Jean-Blaise Djian, scénariste Bd, vient à Paris dans l’espoir de rencontrer Michel Papazian, ancien boxeur exilé en Union Soviétique. L’homme à la retraite habite un modeste appartement Porte de Bagnolet. Son histoire commence en 1915 avec le triste génocide arménien. Afin d’échapper au massacre, ses parents fuient leur pays pour la France. A Nice, les années passent et Mr et Mme Papazian ont réussi à s’y faire une place au soleil. Le papa de Michel tient un salon de coiffure. Sa maman accouche elle un 3 février 1934 d’un troisième fils, prénommé donc Michel. Michel ne ressemble pas à ses aînés, Henri et Paul. Eux studieux, lui préfère jouer. Lorsqu’en 1940 Monsieur Papazian s’éteint sur un lit d’hôpital, il fait promettre à sa femme de revenir en Arménie pour que ses enfants connaissent et grandissent dans le « bonheur communiste ». Après son décès, la petite famille déménage à Marseille. Madame Papazian y rencontre le second homme de sa vie, un certain Ratchik. Le 15 août 1944, les Alliés débarquent en Provence et Marseille est libérée. Les Américains ont un camp au quartier Saint-Antoine. Michel s’y rend avec ses copains. Alors que ces derniers se passionnent pour les chars, le garçon tombe lui sous le charme d’un ring sur lequel deux combattants gantés échangent des coups. Michel découvre la boxe : une révélation. Le jeune combattant est un élève doué. Le sergent Ribbert le prend sous son aile. Michel apprend vite. Quand les Alliés rentrent chez eux, le sous-officier offre à Michel l’occasion de le suivre. Mais sa maman refuse. L’heure est venue de tenir la promesse faite à son défunt époux…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
199 combats, 184 victoires, 5 fois champion d’Arménie, 3 fois médaillé d’argent au championnat d’URSS, 2 fois champion d’URSS par équipes (…) Des statistiques impressionnantes pour celui qui fut sans doute le boxeur français le plus doué de sa génération dans sa catégorie. Michel Papazian, français d’origine arménienne, ancien entraineur national aujourd’hui à la retraite, reste pourtant largement méconnu du grand public. « Boxeur de la guerre froide », vainqueur sous Staline et Khrouchtchev, privé de titre olympique par peur de passage à l’Ouest, il fit sa carrière derrière le rideau de fer. C’est son histoire d’homme et de champion hors norme que nous raconte ici Jean-Blaise Djian et Nicolas Brachet. Un album politique, engagé – tel que le confirme l’emploi du terme de « génocide » pour le massacre des Arméniens en 1915 – et de poids, puisque directement adapté du témoignage saisissant de Michel Papazian. Si la narration adopte une ligne un peu classique, linéaire (on aurait pu, peut-être, éviter les débuts en gare de Paris St-Lazare et la toute fin qui n’intéresse directement que le témoin), elle a le mérite d’être claire, efficace. La charge émotionnelle restituée aurait pu donc être plus grande, mais les péripéties, joies et coups-bas rapportés, suffisent à tenir le lecteur en haleine. Parce que, quelle vie ! On tient là un vrai champion. Après deux fictions « sociales », la nouvelle collection Atmosphères sport des éditions EP accueille un récit brut et entier. Si la boxe n’a pas toujours le dessus sur le parcours de l’homme, l’exercice se fait trop rare en bande dessinée. Côté dessin, pour un coup d’essai c’est un coup de maître ! Nicolas Brachet, livre un premier album plein de promesses. Le trait est expressif, le coup d’œil y est, le crayonné appliqué et encré très légèrement, la mise en couleurs sobre, impeccable. L’artiste nous reviendra. Accessible à tous, 199 combats est à mettre entre toutes les mains. Le meilleur des trois titres sortis jusqu’à présent dans cette collection d’avenir, en attendant la montagne…