L'histoire :
Au milieu des années 30, Jacques Benzara est un jeune homme doué pour le football et respecté dans son quartier de Tunis. Il va souvent au cinéma et dispute des matchs le week-end. Un jour qu’il rivalise de talent face au club de Constantine (3 buts à lui tout seul !), il est repéré par un recruteur venu de France. Habillé d’un élégant costume de flanelle blanche, ce dernier semble très aisé et il lui propose de prendre un verre. Il se présente, Fernand Teillard, et lui annonce qu’il travaille pour le Miroir des sports, un journal à la Une duquel il verrait bien la photo de Jacques, dans quelques années, tant son talent est grand. Il faut à Jacques attendre quelques mois pour recevoir une réelle invitation à intégrer le Red Star, le club de Saint Ouen. Jacques accepte, évidemment, et entreprend le voyage. Il rejoint Marseille en bateau, puis la capitale en train. Il découvre les premiers entrainements sous la neige, et suit de loin les propagandes pro-Mussolini et son opposée pro-communiste. Il s’évertue surtout à progresser, pour honorer son contrat de deux ans. En mai 1937, il est enfin titulaire pour un match contre Lille, au stade Bauer. Son talent lui permet de marquer immédiatement son premier but. Puis deux contre Bordeaux la semaine suivante. En quelques matchs, il devient une star, les supporters le renomment Jack Ben…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce footballeur et son histoire tragique durant la répression de Vichy sont fictifs. S’ils paraissent pourtant terriblement crédibles, c’est que le scénariste Didider Daenincks s’est inspiré du destin tragique du boxeur juif-tunisien Victor Young Perez, déporté et assassiné à Auschwitz. Le scénariste a donc inventé un destin, afin d’éviter les clichés des romans noirs avec un boxeur solitaire, et le rattacher aux valeurs humaines d’un sport collectif. N’oublions pas aussi que la première édition de cette histoire date de l’an 2000, soit deux ans après que la France a été championne du monde de la discipline. Des stades aux plateaux de cinéma, en passant par la rafle du Vel d’hiv’, on ne peut qu’être touché par ce destin plausible de sportif de haut-niveau sous la répression nazie. On peut aussi regretter que Daenincks emploie une grosse facilité de l’art séquentiel : un récit raconté à 90% au travers d’encadrés narratifs, descriptifs de l’action. Cet album permet néanmoins d’apprécier l’une des premières œuvres demi-réaliste d’Hasaf Hanuka, un artiste israélien qui se distingue depuis lors dans un tout autre registre : l’humour introspectif, géopolitique et cynique (KO à Tel Aviv).