L'histoire :
Deux types en costard sont montés au sommet d’un building d’une puissante multinationale américaine, afin de tenter de renégocier « les contrats ». Bedonnant, cigare au bec, le PDG reste inflexible : c’est non. Les temps sont durs, la rentabilité est le maître-mot, la loi de l’offre et la demande est la seule religion qui organise le marché, et leur proposition ne l’enthousiasme visiblement pas. Pire : alors même que les deux types sentent qu’ils sont à bout d’arguments, le PDG est interrompu par un coup de fil. Visiblement, l’offre que lui fait son mystérieux interlocuteur téléphonique ne connait aucune rivalité possible. Les deux types s’en vont en colère, déçus par tant d’ingratitude. Ils montent jusqu’à la terrasse du building. Là, ils se déshabillent et laisse apparaître leur réelle apparence : ce sont des anges, qui montent sur le parapet et s’envolent vers les nuages célestes, afin d’y faire leur triste rapport à Dieu. Ils se présentent devant le vieux tout penauds, car ils se sont fait piquer le marché. En effet, quelques kilomètres plus bas, sur un trottoir, un client achète un hot-dog à un snack ambulant, en tendant au vendeur un billet de 1 dollar, sur lequel est désormais inscrit : « In Google we trust »…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En raison du léger archaïsme de ses protagonistes et de quelques-uns de ses concepts, le Premier Testament biblique n’est plus franchement abordé au pied de la lettre, à notre époque – du moins par le commun des mortels. Aussi, était-il urgent de le réécrire à l’aune des nouvelles technologies, de la mondialisation, du consumérisme comme religion ultime, et de l’autodestruction humaine programmée. C’est à cela que s’emploient James (aux scénarios) et son vieux compère Borris Mirroir (au dessin), à travers les 15 historiettes de ce Dieu Point Zéro. Les inventeurs de l’Ottoprod Code Authority (une charte assumée de goûts contestables) parodient ainsi la chrétienté dans les grandes largeurs, en jouant de tous les clichés. Avec sa toge, sa barbe, sa pipe et son œil dans un triangle au-dessus de la tête, Dieu y est représenté comme le manager suprême d’une multinationale qui régule à peu près tout sur la planète (du moins, il essaie). Installé sur un nuage, il est aidé d’une poignée d’anges moyennement compétents et il est régulièrement visité par d’autres acteurs de la chrétienté : le fiston Jésus (brimé et candide), la vierge Marie (en femen émancipée), Satan (avec lequel il faut négocier les calamités annuelles), mais aussi des concurrents (Yoda, Vishnou, des témoins de Jéhovah), ou le petit personnel (l’ange Gabriel, Saint Barthelemy qui culpabilise toujours)… Le résultat sur nos zygomatiques de ces tranches prépubliées dans le magazine Fluide Glacial est toujours fun, rarement hilarant, mais souvent bien vu.