L'histoire :
Une femme achète une baguette à la boulangerie. La caissière lui demande 10 euros. La cliente s’insurge : la personne avant elle n’a payé que 5 euros ! Oui mais voilà, la baguette est indexée sur le cours de la bourse et le prix du pain est actualisé en temps réel. La caissière conseille même à la cliente de se dépêcher de payer car le cours du pain vient encore de prendre 40%. Bientôt, les boulangers devront faire leurs livraisons en camions blindés et escortés par des gendarmes en tenue de commando, comme pour les transferts de fonds…
La maman de Léo accompagne son fils pour sa première journée à l’école maternelle. Elle s’étonne que les enfants soient livrés à eux-mêmes dans leur classe, sans surveillance. L’unique homme qui l’accueille lui affirme que c’est normal : il est aussi leur instituteur, mais le mardi, il s’occupe aussi de la direction. Il est aussi le cuisinier et l’homme de ménage, le tout pour les 11 classes de l’école. Telle est la nouvelle réforme de réduction des coûts. Choquée, la mère de Léo peut toujours demander une inspection académique : l’homme s’est lui-même inspecté pas plus tard que la semaine dernière…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
On prend la même méthode, les mêmes auteurs et on continue ! Sur des scénarios de Jorge Bernstein et de Vincent Haudiquet, Emmanuel Reuzé met en scène des gags en une planche, de 1 à 6 cases, selon une technique aussi économique qu’efficace en matière zygomatique : une même case chiadée est dupliquée à l’identique, avec juste quelques détails et les phylactères qui changent (comme dans Zaï Zaï Zaï Zaï de Fabcaro). L’objectif principal et toujours atteint, ambitionne de parodier jusqu’à l’outrance les aberrations sociales de notre époque. On se prend en effet régulièrement à penser que notre monde est devenu fou… Et bien ce trio d’auteurs là pousse le bouchon jusqu’à l’absurde, afin de singer jusqu’au ridicule et au n’importe quoi les bases dérangeantes de ces débuts de déviances. Par exemple, le pain indexé sur la bourse en temps réel, qui devient une denrée de luxe. Ou encore les réductions de coûts drastiques dans les services publics essentiels et néanmoins pervertis en tant que contrats commerciaux : l’école, la médecine, la police… Dans ce 4ème recueil, les auteurs écornent encore : la pollution ordinaire, l’art contemporain, les emplois fictifs, les effets de mode, les shows pseudo caritatifs, la logique de l’emballement dans les pénuries, l’esprit de Noël, l’intelligence artificielle, le racisme dans le foot, la pédophilie, les influenceurs, le sport en salle, le prix de l’électricité, la chasse… Les sources d‘inspiration ne manque pas et sont sans cesse renouvelées : il suffit d’allumer une chaine d’info pour que ça pleuve. Cette série a encore de beaux jours devant elle.