L'histoire :
Au crépuscule, muni de son bob et de ses sandalettes, un homme avance sur le sable d’un rivage déserté, un détecteur de métaux à la main et un casque vissé sur les oreilles. Sa quête est parfois fructueuse, lorsqu’il peut exhumer une gourmette échappée d’un poignet trop fin, ou une devise exotique témoignant du passage d’hommes venus d’un autre méridien. Soudain, c’est l’accident. Son détecteur de métal heurte en effet un autre détecteur de métal, plus robuste. L’homme lève les yeux et découvre qu’il se trouve face à face avec Junia l’amazone, l’impératrice des objets brillants trouvés, la maîtresse incontestée et redoutée de ces lieux. Julia ne tolère pas la présence de cet étranger sur son territoire, qui cherche à la spolier impudemment de ses trésors. Elle exige du quidam qu’il lui remette son maigre butin, quitte à brider son vide émotionnel. Bouleversé et coupable, l’homme se liquéfie littéralement. A genoux, il supplie Junia de l’épargner et de l’emmener avec lui. Il lui promet d’être son page, son écuyer, son fidèle assistant. Il se voue tout entier à la radiance de la céleste ambition de Junia, à sa soif de stade suprême de l’être, où la douleur de la solitude n’est plus qu’un ancien songe. Heureusement pour lui, Junia est magnanime…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La nouvelle collection L’institut Fluide Glacial (« de la recherche pour l’umour ») se propose de focaliser sur un auteur particulier, en recueillant la crème de la crème de ses meilleures historiettes prépubliées dans Fluide Glacial. Geoffroy Monde, au patronyme improbable, a le privilège d’inaugurer la collection. Autre privilège de taille et parfaitement adapté à son registre absurde : il est justement parrainé et encensé par Daniel Goosens, qui se fend de quelques dessins et d’une interview croisée en fin d’album. Cette dernière en révèle beaucoup sur les mécanismes humoristiques dont Geoffroy Monde est animé. Car ce dernier n’est pas seulement l’auteur de l’excellente trilogie de science-fiction Poussière… Il est aussi très pointu en matière de gags bien barrés et néanmoins agrémentés d’une verve toute littéraire, d’une poésie moderne du non-sens. Et il n’hésite jamais à s’aventurer dans des registres variés et insolites (science-fiction, médiéval, chronique sociale, super-héroïque, policier…), quitte à en apprendre le catéchisme à la vitesse de l’éclair au galop (ce qui va très très vite), sautant tel un cabris de la grandiloquence au juste débile, en passant par tout un tas de fausses pistes astucieuses. D’une grande souplesse, tantôt fin, tantôt épais, son style de dessin varie du semi-réaliste au caricatural, au gré des besoins du genre. Il s’inscrit au sein d’un découpage souvent serré, de cadrages parfois décalés, de mouvements dynamiques, de profondeurs culottées, de teintes délavées et modernes. Laissez-vous surprendre par le Monde.