L'histoire :
Tafafilt est un petit village marocain perdu dans les montagnes. C'est là que vit Djara, une jeune bergère de 16 ans. Sa famille est très modeste, sa maman courageuse s'occupe de ses sept frères et sœurs, et du père de famille, que Djara n'aime pas. La jeune fille s'ennuie et reçoit en cadeau d'un visiteur occasionnel des yaourts et des gourmandises qui lui procurent du plaisir. Certes, pour cela, Miloud abuse d'elle. Mais après tout, et même s'il la dégoûte, pourquoi se priverait-elle de ses Raïbi Jamila à la grenadine ? Il faut dire que Djara est très belle, et qu'elle rêve d'une vie où il se passerait quelque chose. Allah, probablement, ne s'intéresse pas à elle. Pourtant, elle lui adresse des prières, partagée entre le respect qu'elle éprouve et la culpabilité qu'elle ressent. Mais un jour, une valise tombe du bus qui va vers la ville de Belsouss, dans laquelle Djara trouve des vêtements féminins, tellement jolis, tellement différents. Tout va alors s'accélérer dans la vie de la jeune fille. A sa grande surprise, et en raison de sa grande naïveté, elle tombe enceinte. Renvoyée du village, elle va rejoindre la ville, vivre de petits boulots, et lorsque son enfant naît, elle prend une décision irrémédiable. A compter de ce jour, son destin en main, Djara va devenir une femme comme aucune autre...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
C'est un étonnant voyage auquel nous prenons part en compagnie de Djara, jeune femme initialement innocente, qui mène sa vie sans aucun tabou ni aucun sens moral, et devient totalement libre dans un pays aux traditions fortes. Le récit d'Eddy Simon, adapté du roman de Saphia Azzedine, use d'un ton à la fois léger et profond pour décrire son incroyable caractère, dont la liberté totale et parfois choquante sonnent étonnamment naturels. Djara semble exister vraiment, sa voix off qui invoque Allah est touchante et toujours incroyablement naïve. La dureté du personnage qui prend des décisions parfois radicales, cette forme de mépris dominateur sur les hommes, tout dans cette jeune femme fascine et donne à réfléchir. La jeune bergère innocente du début, qui croit que la virginité se mesure aux poils pubiens, devient une prostituée de luxe qui continue pourtant à se confier à son Dieu pour qu'il l'aide à traverser sa vie. L'adaptation est plus légère en apparence et forcément plus superficielle que le livre d'Azzedine, mais les auteurs réussissent à préserver l'esprit de Djara, tout en ajoutant des temps spécifiques à la narration en BD, sous les très belles cases de Marie Avril. L'album est fascinant dès sa première page, intelligent et drôle, et donne une envie folle de se plonger dans le travail de l'écrivaine médiatique, dont c'était le premier roman.
