L'histoire :
En mai 2013, le journaliste Sylvain Lapoix visite pour la première fois un site d’extraction de gaz de schiste dans le Dakota du Nord. Rien qu’au paysage, il prend aussitôt la mesure que cette exploitation est la première ressource économique de cet état : des routes droites et interminables le traversent, sur lesquelles vrombissent des milliers de camions porteurs de puits, de béton, de tubes, de produits chimiques, de sable… Finalement, c’est de nuit qu’il découvre des puits de pétrole, surmontés par des chalumeaux géants : ici, on brûle les gaz de schiste à la sortie même du puits. Choqué, le journaliste décide alors de débuter une fastidieuse mais complète enquête pour établir la vérité sur cette énergie fossile. Tout d’abord, il remonte à 1949, année où Riley Farris, ingénieur pour la société Stanolind, imagina pour la première fois un procédé de fracturation de la roche dans laquelle se trouvait enfermé le gaz du sous-sol. Selon lui, il fallait y ajouter un solvant pour liquéfier la colonne où on injectait de l’eau à haute pression, afin de tout faire remonter à la surface. Le premier solvant utilisé pour les tests fut du napalm… et l’expérience, un échec.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Energies extrêmes est une enquête minutieuse et complète sur l’exploitation des gaz de schistes : les limites techniques de son extraction (la fracturation), le constat environnemental terrible dans certains pays étrangers et ses tergiversations politiques en France (erreur ou opportunité ?). La prépublication en 3 volets dans la Revue dessinée avait certes permis un rythme de lecture plus digeste et progressif que cet épais volume. En effet, par souci d’honnêteté et d’intégrité, le journaliste engagé Sylvain Lapoix a archi-documenté son étude. Il étaye son sujet de beaucoup de digressions, de détours, de précisions, certes nécessaires dans le cadre d’un travail universitaire ou journalistique, mais beaucoup moins s’agissant de communiquer sa démonstration en BD. En bref, il en délivre mille fois trop pour mettre ses investigations à la portée du grand public. Surtout, il n’a pas vraiment notion du rythme séquentiel adapté, le paramètre premier et inhérent à l’art de la bande dessinée, qui permet de rendre un sujet accessible et attachant. De fait, Daniel Blancou illustre ces recherches comme il le peut, à l’aide d’un dessin réaliste certes régulier, mais froid, « platement » descriptif des clichés dont il est majoritairement issu. On sort certes de cette lecture totalement convaincu de la tragique bêtise que représente cette solution énergétique, mais épuisé par la somme de la démonstration. Dommage, car l’ambition était louable et la cause nécessaire.