L'histoire :
Mai 1890. Teodor Jozef Konrad Korzeniowski, capitaine de la marine britannique, est engagé comme officier de marine marchande par la Société Anonyme Belge pour prendre le contrôle d'un steamer et rétablir des liens commerciaux avec le directeur d'un comptoir au cœur de la jungle. Direction le Haut-Congo et son commerce a priori juteux. Un eldorado en devenir, même. Pourtant, le jeune capitaine déjà expérimenté se rend en Afrique habité par un sentiment d'appréhension inhabituel. Ce mauvais pressentiment va être confirmé peu après son arrivée sur le continent : longues marches, chaleur étouffante de la forêt équatoriale, promiscuité, maladies, fièvres et traitements inhumains réservés par ses compatriotes aux autochtones qu'ils exploitent. Loin de l'imagerie traditionnelle vantant les mérites et idéaux philanthropiques de la colonisation, Konrad va découvrir un enfer au-delà des ténèbres. De quoi remettre en question à jamais l'idéal humaniste occidental et nourrir quelques désillusions...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Christian Périssin et Tom Tirabosco adaptent ici le célèbre roman de Joseph Conrad, Au coeur des ténèbres, critique de l'impérialisme occidental et remise à plat de l'idéal humaniste vanté par la propagande colonialiste. L'histoire relate l'expérience de ce jeune capitaine qui découvre une nature hostile pleine de dangers et des individus habités par une cupidité sans bornes, moteurs du mercantilisme le plus sauvage. Face à la déshumanisation lente et forcée de la main d'œuvre et aux traitements barbares infligés, le témoin remettra en question l'idéal humanitaire de la colonisation et son intérêt économique, c'est-à-dire la vocation de l'Occident à apporter partout dans le monde les lumières de la raison. Avec didactisme et pédagogie, Périssin retrace l'itinéraire de ce capitaine plongé dans l'enfer du fleuve Congo, entre les crocodiles, la moiteur de la forêt et de « sordides aventuriers, des téméraires sans vaillance, des cupides sans audace, des cruels sans courage... ». Reste que la narration linéaire plan-plan et le résultat sont souvent sages ou scolaires, l'ensemble ne restituant pas tout à fait la puissance de l'expérience, à la différence du chef-d'oeuvre de Werner Herzog (Aguirre, la colère de dieu) qui avait su montrer la folie et les implications d'une conquête coloniale. Côté graphisme, une technique au monotype pour un rendu sombre et noire, façon gravure, agréable et lisible, mais peut-être trop lisse, finalement. Pour qui s'intéresse à la conquête coloniale, Kongo demeure une BD historique instructive qui mérite le coup d'œil.
