L'histoire :
8 Mai 1945. Berlin est en ruines, ravagée par les combats entre l'armée russe et les derniers soldats de la Wehrmacht. Dans ce décor apocalyptique et chaotique, Andreas et Konrad Werner, deux jeunes frères, essaient tant bien que mal de survivre. Ils parviennent à rejoindre les routes de l'exode et tombent sur un homme et sa femme, qui gagnent Leipzig avec une charrette tirée par un cheval. À l'arrière, ils font la connaissance d'un soldat bien amoché par les combats. Leipzig, 6 mars 1953. Staline est mort. Dans leur appartement, Konrad et Andreas rêvent d'une Allemagne à nouveau unifiée. Leipzig, 17 juin 1953. Les manifestations battent leur plein dehors. Konrad profite de la situation tendue pour aller chercher des médicaments dans une pharmacie abandonnée dans les rues désertiques. Il prend de l'aspirine et se fait cueillir en sortant par la police d'État. Arrêté et incarcéré, il est interrogé par des membres de la Stasi qui lui proposent de rejoindre leurs rangs. Il devra travailler pour eux, combattre le fascisme, empêcher la guerre de revenir. S'il refuse, son frère sera condamné à l'orphelinat. Obligé d'accepter, Konrad voit Andreas le suivre dans cette aventure politique...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après le succès retentissant, public comme critique, du Voyage de Marcel Grob (115 000 exemplaires vendus quand même !), Philippe Collin et Sébastien Goethals récidivent avec un nouveau roman graphique historique. La Patrie des frères Werner nous embarque en pleine guerre froide, en Allemagne coupée en deux, pour nous français, à travers le destin contrarié de deux frères devenus agents de la Stasi. Bien développée par un scénario solide, leur ascension est fulgurante et trouve un point d'orgue : un match de foot à haute valeur symbolique (visant à montrer la supériorité du régime socialiste sur le monde capitaliste) qui se déroule au Wolksparkstadion (« Parc du peuple ») de Hambourg, le dernier match du groupe 1 de la Coupe du Monde de foot , opposant la RFA de Breitner et Beckenbauer à la RDA. En jeu, la première place du groupe ! La tension politique, bien amenée par les textes précis et documentés de Philippe Collin, est à son paroxysme. A travers une galerie de personnages bien croqués au cœur d'une Histoire qui les dépasse, le dessin de Goethals fait la part-belle à des personnalités aux caractères bien travaillés et aux visages particulièrement expressifs, grâce à un éclairage chromatique bien orchestré. Sa dimension graphique s'accorde aussi parfaitement aux séquences footballistiques qui combleront les nostalgiques et aux décors d'un autre temps. En fin d'album, un dossier historique de Fabien Archambault, qui rédige l'ouvrage Le football des nations, des terrains de jeu aux communautés imaginées, apporte un éclairage salutaire à cette époque nébuleuse à souhait et montre à quel point le sport roi est vecteur d'enjeux politiques.
