L'histoire :
Il est un monde que l’on nomme Klokochazia. Ses habitants y parlent une langue musicale que l’on peine à traduire justement. Sur les berges du lac des Vélies se dresse l’arbre Sladinji, de toute éternité. En son tronc, le terrible Günel – la plus triste créature de Klokochazia – est née. L’être à l’enfance difficile, seriné des pleurs de gens venus se lamenter au pied de l’arbre (comme le veut la coutume) et du grondement sourd montant des racines, entendit un jour une tout autre musique à la surface. La douce Milenaz versait des larmes qui sonnait à ses oreilles comme autant de notes agréables (…). Günel sortit pour la première fois à la lumière. Mais, de maladresse, il blessa son aimée quand il souhaitait l’embrasser. La jeune femme s’enfuit par la forêt et Günel partit sur ses traces. Il rencontra en chemin le vieil ermite Vlokiz. L’ancêtre, touché par sa sincérité de cœur, s’enquit d’apprendre à l’éconduit quelques règles de savoir vivre. Vlokiz confia aussi à Günel que, parmi les artefacts laissés par les regrettés Libadi, existaient les objets « sentimenteux ». Et que le cinquième pétale de l’un d’eux, la fleur de Jaün, porté aux lèvres, avait le pouvoir de se faire aimer de l’être choisi…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
L’idée d’associer musique et bande dessinée n’est pas nouvelle. Cependant, à la différence du cinéma ou du télévisuel, le lecteur d’une bande dessinée est un actif qui s’ignore. La synchronisation difficile du rythme différent de lecture propre à chacun et du dessin, séquencé en planches – et, plus précisément, la plupart du temps en cases – rend l’exercice improbable et son résultat plus encore. Tiré d’une œuvre musicale contemporaine, Le Lac aux Vélies n’est pas à proprement parlé une bande dessinée mais plutôt une mise en image, une traduction illustrée, du monde composé par Labyala Nosfell et Pierre Le Bourgeois. L’univers de Klokochazia offre une mythologie sourde dans lequel évolue nombre de personnages torturés et de créatures étranges. Cet univers impressionne par sa cohérence et sa richesse, notamment sa langue originale inventée de toute pièce, écrite et chantée ! (…) L’œuvre créée probablement tant pour être entendue qu’apprécier esthétiquement, Ludovic Debeurme – remarqué pour Lucille chez le même éditeur, dont la seconde partie est espérée l’année prochaine – sans doute tombé sous le charme, se charge ici du travail. A chaque tableau de l’œuvre est proposée une traduction crayonnée, emprunte de poésie et d’étrangeté. Des corps difformes, d’étonnantes curiosités, un trait appliqué. Le Lac des Vélies n’est qu’un prisme d’entrée dans l’univers de Klokochazia. Il aura fallu une audace certaine à ses auteurs, son éditeur et son lecteur (!) pour sauter le pas. Pour en revenir à l’association de la musique et du dessin, convenons ici que les tableaux musicaux débordent encore de beaucoup ceux illustrés. Mais l’ambiance est bonne, envoûtante. L’expérience intéressante, entêtante. A apprécier.