L'histoire :
En novembre 2023, Alice Desbiolles fait une visite de la grotte du Pech-Merle dans le Lot, en compagnie de son jeune fils Charly. Ils observent les peintures rupestres et la racine hyper profonde d’un arbre âgé de 300 ans. Pour Alice, cet arbre est un message d’espoir en ces temps d’éco-anxiété. Car elle prend conscience qu’à l’extérieur de la grotte, sécheresse, ouragans, guerres, urgence climatique sont annonciateurs d’une fin du monde proche. Elle en profite pour expliquer à Charly – qui ne veut plus ressortir ! – la parabole de la caverne de Platon. La vérité extérieure est trop aveuglante pour que les hommes des cavernes veuillent s’y confronter. Ils préfèrent rester à l’intérieur de la caverne, dans l’obscurité/obscurantisme, si rassurant. Alice décide quant à elle d’ouvrir des portes qui lui permettent de sortir de la caverne, afin d’apporter des preuves à Charly que ce monde vaut le coup. Première étape : son souvenir d’enfance de la visite de la grande galerie de l’Evolution au Muséum National d’Histoire Naturelle. C’est là qu’est né son souci de la nature. C’est là qu’elle prend conscience du piteux état actuel de la conservation des espèces. Par exemple, Madagascar aurait perdu 44% de ses forêts naturelles depuis les années 50…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Clairement, à la vitesse à laquelle l’humanité pourrit la planète Terre, accélère le réchauffement climatique et décime la biodiversité sans réagir, l’anthropocène va s’éteindre d’elle-même. Tout aussi clairement, cette perspective fiche des frissons dans le dos et nourrit une « éco-anxiété »… qui nuit elle-même à toute pulsion de réaction. Pourquoi agir, puisque tout est foutu ? Comment agir, puisque l’humain n’est jamais prêt à renoncer à son confort et aux outils apportés par la modernité ? Alice Desbiolles propose ici d’analyser ce phénomène paralysant d’éco-anxiété et de proposer une « voie centrale », en prenant Le meilleur des deux mondes : c’est-à-dire conserver les atouts de la modernité, mais en étant plus vertueux envers la nature, sans tomber dans les excès de la régression écologiste stakhanoviste. Tout part d’une visite au sein d’une caverne préhistorique, que l’autrice, elle-même mise en scène, fait en compagnie de son fils – ce qui lui permet de boucler avec la mythique métaphore platonicienne. Six chapitres s’enchainent, qui abordent successivement : la question de la biodiversité (elle gagnera pour compagnon d’analyse, jusqu’au terme de l’album, un dodo, race éteinte), l’époque des grandes explorations et de la mainmise sur la planète, les perturbateurs endocriniens, la responsabilité citoyenne individuelle, le concours d’architecture final à la Cité des Sciences et de l’Industrie, qui permet de déterminer le modèle de cité équilibrée. Sous les pinceaux d’Anne Défrille, l’ensemble paraîtra enfoncer des portes ouvertes aux lecteurs déjà sensibilisés par la cause écologique. Cet ouvrage a toutefois le mérite de remettre l’Eglise au milieu du village, avec une proposition d’action collective viable, à la marge du militantisme injonctif. Il ne reste plus qu’à l’essayer…
