L'histoire :
Cuba, au début des années 50. Un gamin court dans les rues de La Havane pour rejoindre un vieil homme, qu'il considère comme son grand-père, dans un village de pêcheurs situé non loin sur la côte. Le vieux Santiago a la poise depuis pas mal de temps. Malgré son savoir-faire et la discipline à laquelle il s'astreint depuis bien longtemps, il revient inlassablement bredouille de ses virées en mer. Il a tout appris au gamin, mais celui-ci a du arrêter les sorties en mer avec lui, car il faut bien gagner sa vie. Il a ainsi intégré un équipage qui connaît meilleure fortune. La guigne du vieil homme lui vaut désormais le surnom de « salao », ce qui est sans doute la pire insulte qu'on fasse à un homme. Cela veut dire qu'il est un bon à rien que la chance a abandonné. Et cela, le petit bonhomme ne veut pas y croire...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les adaptations en BD de romans, nouvelles et autres œuvres littéraires sont légion, mais certaines d'entre-elles sortent du lot. Si on doit souligner la première des qualités de celle que Thierry Murat vient de signer avec Le vieil homme et la mer, c'est qu'elle reprend à merveille l'esprit du chef-d’œuvre (parmi quelques autres) qu'a écrit Ernest Hemingway. Et qui de mieux que l'homme qui s'est frotté à cette tâche on-ne-peut-plus-casse-gueule pour en parler ? Rendons au dessinateur-scénariste ce qui lui appartient : « Je crois que je ne m'étais pas vraiment rendu compte à quel point ce récit, d'une puissance et d'une beauté bouleversante, est à la fois court et gigantesque. Une espèce de densité cosmique... (...) Honnêtement, je ne crois pas que l'on puisse trouver dans la littérature contemporaine un autre texte capable de porter toute la condition humaine dans toute sa complexité et qui tienne comme ça, dans le creux de la main, tranquillement, l'air de rien, sous les traits d'une "petite" partie de pêche ». De quoi se mettre la pression. Alors, comme pour respecter la solitude du personnage principal, Santiago, ce vieux pêcheur auquel on s'attache immédiatement, Thierry Murat s'est isolé pour rendre 120 planches dont on devine qu'elles furent aussi un combat. Lui aussi, il allait à la pêche au gros avec cette adaptation. Comme ses lecteurs pouvaient s'y attendre, il s'est bien gardé de faire dans l'extravagant. Au contraire, il a choisi une grande sobriété dans sa mise en page. Un découpage parfait, où chaque bande restitue la magnifique intensité du récit. Une lumière orangée, l'immensité de l'océan et du ciel qui se confondent, des scènes nocturnes de toute beauté et ce vieil homme qui accomplit la sortie de sa vie. Une esthétique sobre qui permet de focaliser sur les textes et la voix-off de ce vieux pêcheur plein de dignité. Allez, on ne va pas s'attarder plus que cela : si vous aimez l’œuvre originale et/ou si vous êtes un féru de BD, ce bouquin ne peut tomber ailleurs que dans votre filet...