L'histoire :
Tout commence par un récit légendaire narrant l'épopée de Gilgamesh, un des textes les plus anciens... Puis de la fin du XVème siècle au XVIème siècle, la maîtrise des mers changera de camp : d'abord dominateurs en Méditerranée, les Musulmans, dans la dynamique des conquêtes ottomanes, prennent le dessus sur les chrétiens, pour finalement passer sous la coupe des nations européennes. A la fin du XVIIIème siècle naît un Etat indépendant, les Etats-Unis d'Amérique. En 1803, le président Jefferson, après avoir obtenu du congrès des moyens matériels importants, se lance à l'assaut de la Libye... Mais en retour, la Libye appelle toutes les autres régences à la guerre sainte contre les Américains. Débutent alors des tensions entre Etats-Unis et Moyen-Orient, de Roosevelt au roi d'Arabie Saoudite Ibn Saoud en passant par le coup d'état américain de 1953 en Iran contre Mossadegh. Teintées d'amour-haine, d'impérialisme larvé et de tentatives d'ingérence, les relations entre ces deux zones géographiques ont souvent révélé des stratégies géopolitiques complexes. Une course au prestige, aux ressources et une volonté de domination politique ou économique, avec en prime quelques mensonges d'Etat, des idéaux bafoués et deux cultures qui, tour à tour, s'aiment ou se haïssent : voici de 1783 à 1953, "une histoire des relations entre les États-Unis et le Moyen-Orient »...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Décryptant les stratégies géopolitiques à l'œuvre en les replaçant dans le contexte d'époque, Jean-Pierre Filiu et David B ont réussi un exercice difficile : celui de raconter deux siècles de relations politiques tourmentées entre les jeunes mais néanmoins conquérants Etats-Unis et le Moyen-Orient. Relatant des faits souvent peu connus du grand public et même des historiens, le livre présente des épisodes courts mais précis et efficaces, dans la plus pure tradition du récit historique, le tout avec rigueur et suffisamment de distance. Rien d'étonnant quand on sait que J.P Filiu est historien de métier, spécialiste de l'Orient. L'homme avance donc en scientifique prudent, avec toujours le souci didactique d'éclairer le lecteur, de lui donner la matière historique pour mieux comprendre les enjeux politiques contemporains, jamais réductibles au seul pétrole. Il en ressort une histoire au souci d'objectivité permanent, jamais manichéenne et sans verbiage inutile. Le dessin, quant à lui, n'est pas une simple illustration de frise chronologique. David B. évite le plus souvent tout réalisme graphique pour lui préférer un trait fantaisiste ou fantasmé insistant sur l'essentiel : des armes, des visages, du pétrole... Qui d'ailleurs confère du souffle à l'ensemble, malgré un rythme, il est vrai, assez monocorde. Cependant tout y est clair, ludique, déroulé avec fluidité, sans que jamais les auteurs ne sombrent dans le didactisme pesant ou l'intellectualisme aride. Le résultat est captivant. Si vous êtes féru d'Histoire avec un grand H – la vraie guest-star, ici – la BD est vivement conseillée. D'autant que le meilleur reste à venir...