L'histoire :
En 2006, Bri a 57 ans, hospitalisée, elle est dans le coma et meurt après un combat vain contre la maladie. Ses poumons l’ont lâchée. Depuis le diagnostic de sa maladie, elle a préparé ses filles à toujours fait part de son choix. A leur tour devenues mères, elles vont devoir l’aider à partir sereinement. Bri a été claire : elle ne veut pas finir sa vie branchée H24 sur une machine. C’est dans un cimetière que commence l’histoire. Devant la tombe de Bri, Yvla, sa fille cadette et son mari Grishka évoquent le mariage de l’ex mari de Bri avec sa nouvelle compagne. Scène plutôt cocasse, racontée par la défunte. Les deux filles et leur famille se retrouvent pour fêter la nouvelle union de leur père. Une journée riche en émotion mais éprouvante pour Yvla et Liv. Les filles évoquent chacune différents souvenirs avec leur mère. Par amour pour leur maman, elles acceptent de l’aider à mourir, mais Yvla précise à sa sœur que cette tâche lui incombe car elle est l’aînée. Elles devront assumer leur acte et faire face aux jugements. Bri est fière de ses 2 filles qui ont du caractère et du répondant. Bri le sait, elles sauront faire entendre leur voix et faire comprendre que la vie ne vaut pas d’être vécue ainsi et que personne ne mérite de souffrir. A l’hôpital, le médecin leur explique le déroulement, il faut fixer une date et un horaire et s’y tenir... C’est une épreuve pour les filles, mais elles ne veulent pas voir leur mère dans un tel état plus longtemps. Et les espoirs sont définitivement plus qu’infimes.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Zelba, de son vrai nom Wiebke Petersen, est l’autrice d’un précédent récit autobiographique Dans le même bateau, dans lequel elle raconte ses exploits de championne d’aviron. Dans son nouvel ouvrage, elle aborde un sujet sensible et touchant, un peu tabou mais actuel, sur le droit de mourir dans la dignité. L’euthanasie ou la mot assistée soulèvent de grands débats souvent contradictoires et houleux. Le choix du titre interpelle et s'avère, après lecture, en opposition avec la thématique et l’amour maternel qui en ressort. Son graphisme retranscrit l’authenticité des émotions. Le décor est précis et son trait détouré de noir accorde une impression de réalisme au dessin. L'autrice utilise également les nuances noires et grises pour illustrer les scènes du passé. Le choix de la mort programmée reste une décision lourde et difficile à accepter pour l’entourage. Il faut conjurer entre l’espoir et la lucidité. Zelba raconte avec pudeur son histoire et celle de sa sœur, qu’elle romance a minima. Le récit ne se veut pas larmoyant. Bien qu’émouvant, il n’en est pas moins raconté avec humour et dérision. L'autrice mêle habilement la mort à la vie, sans mélodrame, en confiant la narration à la défunte. Elle ose incarner l’esprit de sa mère pour calquer au mieux ses souvenirs. Évidemment, cette lecture interroge. Et si ? Maintenir les soins palliatifs, pour quoi ? Pour qui ? Quand on n'en peut plus et qu’il n’y a plus d'espoirs.. . Ce livre renvoie au combat médiatisé de Vincent Lambert (à qui elle dédie son livre, d’ailleurs) pour qui les proches ont réclamé des années durant le droit de mourir, pour qu’il cesse de souffrir. L’acharnement thérapeutique a ses limites. Par son témoignage, Zelba milite pour que chacun soit libre de choisir sa fin, et incite insidieusement son lecteur à se positionner et se questionner sur ses propres choix. La mort est universelle mais le choix de mourir reste lui, intimement personnel.