L'histoire :
19 janvier 1919, Saint Moritz, Suisse. Devant le Suvretta house où Nijinski et sa troupe vont se produire, règne une certaine ébullition. Les notables réunis pour assister à l’une des représentations du danseur mythique y vont tous de leurs commentaires. Selon la rumeur, il serait devenu fou : certains l’auraient vu courir presque nu avec une croix, certains insinuent qu’il se prendrait pour dieu et obligerait tout le monde à aller à l’église. Alors que la salle se remplit, l’artiste arrive sur scène, demande au pianiste de jouer du Chopin ou du Schumann et se pose mutique sur une chaise. Après quelques minutes, une des spectatrices du premier rang demande à la musicienne d’interpréter quelque chose de plus connu. Au même moment, Nijinski bondit de sa chaise en agressant verbalement celle qui l’a importuné. Au fil du spectacle, les réactions sont très contrastées entre ceux qui crient au génie et ceux qui quittent la salle exaspérés.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Vaslav Nijinski est un danseur-étoile des ballets russes, d’origine polonaise, qui est né en 1889 et mort en 1950. Ce chorégraphe incroyable a marqué son époque par son génie créatif. Soit adulé, soit détesté, ce provocateur a brisé les codes esthétiques de la danse classique, ouvrant la voie à un art plus moderne. Emporté par la folie, sa carrière artistique durera moins d’une dizaine d’années. Cette copieuse biographie qui s’appuie notamment sur les carnets de Nijinski, sur certaines de ses correspondances épistolaires et sur une solide bibliographie, couvre la période de ses 10 ans jusqu’à ses 30 ans. Elle évoque évidemment les grands moments de sa carrière de danseur mais aussi sa vie de famille, son enfance, les personnes avec qui il a travaillé ou encore celles qu’il a rencontrées comme Cocteau, Chaplin, Sarah Bernhard, Debussy ou encore Duncan. Dominique Osuch rythme son ouvrage en 3 temps : Etincelles, flamboiements et combustions. Chacun de ces actes est lui-même découpé en petits chapitres reprenant des anecdotes marquantes de la vie de cette étoile filante de la danse sans respecter une chronologie linéaire : ce choix narratif avec des allers-retours dans le temps ne facilite pas toujours la lecture, notamment pour un récit de près de 250 pages. Graphiquement, Dominique Osuch restitue avec beaucoup de justesse l’esthétique des mouvements de ce danseur gracieux, et c’est certainement l’atout majeur de cet album.