L'histoire :
Michel Hartog, un riche industriel qui a hérité d’une fortune colossale à la mort accidentelle de son frère et de sa belle sœur, vient de trouver une nouvelle nurse à son neveu dont il est le tuteur. Cette Julie Ballanger, une ex délinquante, il vient de la déloger de l’asile où elle a passé 5 ans. Il faut préciser que notre industriel se veut philanthrope à ses heures. Et que du coup, son personnel est pour la plupart constitué d’infirmes et d’ex indigents. L’arrivée au domicile du nouvel employeur de Julie est saluée par une agression : Fuentès, l’ancien associé d’Hartog, donne du poing et de l’injure à son ancien ami avant de quitter les lieux. Il semble que ce ne soit pas une première… Plus tard, Julie fait connaissance avec le petit Peter dont elle devra s’occuper. Le gamin est insupportable et leur première rencontre se solde par une paire de gifles. Le lendemain, Michel Hartog quitte Paris pour quelques jours. Julie, quant à elle, décide d’aller faire un tour au jardin du Luxembourg avec le charmant bambin. A peine sont-ils arrivés, que Julie se retrouve face à un gros calibre et à son propriétaire nerveux. Le voyou leur intime l’ordre de les suivre, sans leur cacher plus longtemps qu’il s’agit d’un kidnapping. Plus tard, à une centaine de kilomètres, ils sont accueillis au fond des bois par un vieil homme armé d’une carabine. Il s’agit de Thompson, l’un des plus fameux tueur à gages. Et le bonhomme nourrit de biens sombres projets…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Roman chronologiquement antérieur à La position du tireur couché et à Le petit bleu de la côte ouest, cette nouvelle adaptation de Jean-Patrick Manchette par Jacques Tardi emprunte les mêmes tonalités : noir foncé, de la trame narrative jusqu’au bout du pinceau. Récompensé, à la surprise de son auteur, par le Grand Prix de la Littérature Policière en 1973, Ô dingos, ô châteaux! est une « road-story » au casting savoureux. De la nounou à peine sortie de l’asile au tonton, véritable salaud, en passant par le tueur à gages rongé par tous les bouts ou l’exécrable gamin, le récit offre effectivement une jolie gamme de dingos pris peu à peu dans le tourbillon d’une inexorable folie meurtrière. Car il faut reconnaitre que l’intrigue en elle-même ne crée jamais aucune surprise sur le fond. Rien de plus, en somme, qu’une histoire de kidnapping d’enfant, option assassinat qui tourne court et dérive en une longue course-poursuite. Bien plus intéressant, reste le traitement de l’affaire. D’abord par Manchette qui, loin de jouer les dentelières, distille cette fuite en avant en en maitrisant admirablement la montée dramatique : rushs violents ; humour à l’ironie stridente ; phrases courtes, incisives, descriptives et froides d’émotions ; traitement acéré des psychologies en sont des moteurs judicieusement exploités. Et puis il y a ce final frénétique qui boucle impeccablement l’intention. Ensuite, évidemment, il y a le travail de Tardi, dont la mise en scène et le dessin typique (à l’aise comme tout dans cette France des années 70) servent avec évidence l’adaptation. Toujours au service du texte de son ami. Laissant le style du romancier apprivoiser son crayon. Jacques Tardi accompagne cette balade sanglante au diapason. Une nouvelle fois, en tout cas, il rend très largement hommage au travail du romancier, tout en ravissant les nostalgiques des polars noirs à l’ancienne.