L'histoire :
Le témoignage de Nicolas (illustré par E. Davodeau). Lorsque Hervé se présente à l’association Vers un Réseau de Soins, il a alors 23 ans, militaire de son état et vit depuis un an déjà à Verdun. D’un physique maigrelet, il dit avoir réellement envie de décrocher et fume des cigarettes à l’eucalyptus. Il se reconnait « poly-toxicomane » ayant touché à tout, l’alcool mis à part. Cela a commencé au lycée, par quelques pétards, jusqu’à devoir quitter l’école deux mois avant son BAC. Ensuite, il a goûté aux drogues dures (coke, crack, ecstasy…) Il s’y est mis en partie pour fuir son père, dont le seul souvenir de branlées terribles le traumatise. Il a peur et en 2001, il s’engage dans l’armée où il est reconnu et apprécié. Passé brigadier puis tireur d’élite, il finit par être affecté en garnison à Verdun. Là pour combattre l’ennui, avec ses camarades ils font la tournée des bars et se défoncent allégrement grâce à la proximité des plats pays. Catalogué « schizophrène léger » par sa hiérarchie, lorsqu’il vient à l’association, il a donc vraiment la volonté de s’en sortir. Pour quel avenir ? Dans l’espoir que son expérience serve à quelqu’un, son petit frère par exemple, majeur de sa classe en BAC pro…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Depuis Paroles de tolards paru en 1999 (Delcourt), les langues se sont déliées et ce sont aujourd’hui les éditions Futuropolis qui publient en association avec Bdboum des Paroles de tox. Au travers de 12 récits prénommés Willy, Laurence, Bastien (…), des hommes et des femmes se mettent à nu et partagent leurs douloureux vécus. Graphiquement, l’exercice imposé du N/B permet à autant d’auteurs de mettre toute l’étendu de leurs talents au service d’une bonne cause. Le réalisme noir d’Etienne Leroux, les encrages dépouillés et ciselés d’Alfred ou de Nicolas Junker, ou encore l’esthétique torturée, délibérément surchargée et photographique (un visuel de vieux négatifs 8 mm). A chaque histoire son traitement, sa vérité. A chaque fois, on pense toucher le fond un peu plus et cependant demeure une morale, une lueur d’espoir. Impossible que vous ne soyez pas touchés, de près ou de loin, par une telle sincérité. Cette lecture terminée, le débat « drogues dures vs drogues douces » vous fera doucement sourire. Une drogue se définit d’abord par une addiction allant jusqu’à induire une associabilité réelle. « En matière de toxicomanie, il est dit qu’il n’y a pas de truc pour prévenir (…) ; il semble cependant que les témoignages de ceux qui en ont fait l’expérience aient un effet ». 12 récits, 12 leçons de vie sans prétention sinon celle d’avertir. « Il n’y a pas de drogués heureux » (Olievenstein). On ne guérit jamais vraiment d’une addiction. La tentation demeure. Sans doute est-ce la signification du serpent en couverture...