L'histoire :
Il s’appelle Nick Carraway. Ce jeune architecte vient juste de mettre les pieds à Shanghai pour participer à un large projet de réhabilitation immobilière. Le hasard ou le destin – appelez ça comme bon vous semble – le conduit à trouver une maison à la mesure de ses moyens dans un secteur huppé. Un peu à l’écart de la ville, mais surtout juste à coté d’une énorme bâtisse : la demeure de Gatsby, un millionnaire dont les fêtes somptueuses font beaucoup parler. En attendant peut-être, un jour, d’y participer – allez savoir ? – Nick décide de rendre visite à sa cousine Daisy. Il y a bien longtemps qu’il ne l’a pas vue et c’est donc avec plaisir qu’il se rend dans sa grande maison. Tom, son mari, l’accueille avec le verbe fort, fier de lui montrer sa réussite et son argent. Daisy est quant à elle en charmante compagnie, occupée devant un drink, avec la belle et troublante joueuse de golf, Jordan Baker. La soirée est belle, le dîner agréable, mais Nick sent que flotte une énorme tension. Le couple formé par Tom et Daisy semble en effet battre joliment de l’aile. Ce qui est d’ailleurs confirmé, quelques jours plus tard, après un repas un peu arrosé. Tom propose ainsi à Nick de lui présenter la femme d’un pompiste : la belle Myrtle, sa maîtresse...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Pour les uns, l’encre dactylographiée de Francis Scott Fitzgerald. Pour d’autres, le regard clair de Redford, avant de retrouver en 2013 celui de Di Caprio… Lecteurs invétérés et cinéphiles avertis pourraient se surprendre à aimer ce Gatsby le Magnifique traité entre phylactères et couleurs à éclatante luminosité. Car l’adaptation du célèbre roman proposée par Stéphane Melchior-Durand et Benjamin Bachelier est une vraie réussite. D'ailleurs, pas besoin d’être coutumier de l’histoire de cet étrange millionnaire pour se laisser emporter par le souffle romanesque et l’emprise passionnelle ou dramatique du récit confié à nos yeux. Tout est ici parfaitement pesé pour qu’on s’accroche aux personnages en un joli balancement d’empathie et de répulsion. D’abord, certainement grâce à cet impeccable choix narratif, gourmand d’une voix off confiée à l’un des protagonistes et hyper respectueuse de la sonorité littéraire originale. Ensuite, à cause d’une ligne graphique à l’élégance absolue, embellie par une colorisation – et ses sublimes jeux de lumières – chargée d’asseoir le tempo atmosphérique de bout en bout. Aussi, l’émotion et la dramaturgie sertissent-elles la partie qui se joue sous nos yeux. Pour son adaptation, Melchior-Durand s’offre pour unique luxe une transposition du récit dans un Shanghai moderne (alter ego de l’Amérique des années 20 du roman original ?). L’idée est judicieuse, parfaitement crédible et redonne un joli coup de peinture à cet entrelacs convoquant passion, amitié-rivalité, choix irréversibles et pouvoir de l’argent. On retrouve les mêmes protagonistes (Nick Carraway, Jay Gatsby, Daisy et Tom Buchanan, Jordan Baker…), les mêmes mystères, la même inexorable musique du destin. Et pour ne pas nous déplaire, le scénario se concentre plus sur l’intrigue passionnelle que sur le faste boulimique déployé par Jay Gatsby. Bref, on se laisse totalement avaler par le récit : perdus dans cette impeccable dramaturgie et absorbés par un beau brin de dessin.