L'histoire :
Paris, 1967… André a l’habitude des manifs : l’appareil photo en bandoulière, il mitraille cette fois sans relâche ses camarades qui défilent pour la liberté du Vietnam et le départ des américains. Il est d’ailleurs lui-même vietnamien d’origine, mais aussi un fervent militant communiste. Deux particularités additionnées à ses compétences journalistiques et photographiques qui le font se retrouver, à la fin du défilé, dans la grosse voiture d’un homme au costume grisâtre. Le bonhomme n’y va pas par 4 chemins : il suit depuis longtemps André et il lui propose de lui faire revoir son pays. Le journaliste a surtout d’abord peur de se faire casser la figure, mais bientôt il apprend à qui il a affaire : un ponte du KGB qui lui propose ni plus ni moins que de lui faire rejoindre un groupe de « guérilléros » vietnamiens pour faire un reportage. L’objectif est de faire connaitre au monde entier comment se comporte réellement les impérialistes américains en terre vietnamienne, pour que le pays recouvre enfin sa liberté. André accepte sans trop réfléchir et se retrouve moins de deux semaines plus tard en pleine jungle avec un groupe de combattant, son appareil photo, la belle Mai Lan et le grade de lieutenant...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Il y avait bien longtemps qu’André n’avait pas foulé le sol vietnamien… Après 15 ans à s’européaniser en terre française, il retourne – au hasard de son engagement politique et d’une rencontre avec le KGB – au Vietnam, l’appareil photo en bandoulière. En pleine guerre (1967), le simple reportage en compagnie d’un petit groupe de Vietcongs (qui devait lui permettre de révéler au monde les méfaits de l’impérialisme américain) se transforme en véritable quête identitaire. Notre reporter troque ainsi son téléobjectif contre une grosse mitraillette et dégomme du ricain à tout va, histoire de montrer à ses comparses qu’il n’est pas un étranger, mais finalement bien plus vietnamien, bien plus Vietcong qu’eux… Appuyé par un contexte historique significatif et violent, le récit proposé par Allan Barte marque surtout par l’évolution du personnage central : radicale et parfaite pour traduire son questionnement identitaire. La partition graphique zoomorphique choisie (un hommage à Lewis Trondheim qui a été le premier à lui donner sa chance dans le monde de la BD ?) atténue la charge dramatique de l’ensemble avec son petit côté faussement naïf, parfaitement relayé par un jeu de dialogues bien fichu (entre cynisme et drôlerie). On pourrait croire d’ailleurs que le choix de ce type de dessin handicape le propos. Au contraire, sa lisibilité le rend parfaitement clair et en annihile toute tension. Le véritable regret tient plutôt du manque de densité du scénario. On passe trop brutalement d’une étape à l’autre, en particulier dans le changement de personnalité du personnage central, avec en prime un final un brin catapulté. L’ensemble aurait sans doute mérité quelques développements, mais il se révèle plutôt intéressant et prometteur.