L'histoire :
C’est soir de répèt’ au local. Jérémy et ses potes enchainent les morceaux avec frénésie, avant d’aller boire un verre au bar du coin de la rue. En chemin, Jérémy s’énerve en observant un drôle de citoyen. Haillons, mine cadavérique, bave au coin des lèvres et nez dans une poubelle, à la recherche d’un petit quelque chose à glisser dans son estomac : le bonhomme est une de ces larves qui pullulent depuis quelques temps dans le pays. En effet, le gouvernement a eu une idée lumineuse en trouvant le moyen de réveiller les morts pour leur donner du boulot. Des tâches ingrates, d’abord, puis peu à peu, du vrai travail. De quoi mettre Jérémy et bien d’autres en colère : ils ont le sentiment que ces « post-mortem » leur mangent leur pain. D’ailleurs, le lendemain, Jérémy est carrément scotché lorsque son patron lui présente son remplaçant : un de ces enfoirés à tête verte qu’on lui demande en plus de former. En fin de journée, toujours agacé, il reprend son vélo pour rentrer chez lui. La pluie bat son plein, la visibilité est mauvaise et il ne voit pas la voiture arriver... c'est l'accident. Quelques temps plus tard, à l’hôpital, sa mère apprend la terrible nouvelle : Jérémy n’a pas survécu. Désormais, pour elle, se pose une terrible question…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
L’idée de départ soumise par Pierre Maurel est plutôt intéressante. Imaginez, en effet, une société qui « réveillerait » ses morts, de préférence fraichement renvoyés ad patres, pour disposer d’une main d’œuvre gratuite et corvéable à merci... D’ailleurs, l’auteur ne tarde pas à ouvrir quelques pistes judicieuses qui nous entrainent au delà des ressorts classiques utilisés dans les séries mettant en scène zombies, décorum post-apocalypse et tout le tremblement. Ainsi, en opposant rapidement des pro et anti Post Mortem (noms affublés à cette nouvelle composante de la société), Maurel colore intelligemment son propos d’une teinte socio-politique qui dépasse l’orientation fantastique du récit. Plus encore, lorsqu’un des principaux protagonistes, anti-zombies convaincu, en devient un lui-même, par les délices du hasard. Pas besoin d’être hyper affuté, alors, pour comprendre qu’en remplaçant le mot Post Mortem par « immigrés », par exemple, on ouvre une large focale sur les problèmes nauséabonds de nos sociétés « humaines et civilisées ». Intelligent, militant et particulièrement bien vu... Mais au-delà, l’ensemble de l’exercice manque le virage du pleinement captivant. A ce titre, le jeu de la confrontation entre les deux camps manque de peps. Et le scénario ne bascule pas suffisamment pour libérer une bonne dose d’adrénaline capable de nous agripper. On se retrouve d’ailleurs un peu perdu à la fin du récit, sans réellement comprendre s’il s’agit ou non d’une conclusion. Bref, une bonne chronique sociale qui rate une partie du potentiel suscité par le sujet et son contexte. Le trait semi-réaliste et prometteur de Pierre Maurel assume quant à lui le rythme du récit. Il donne en tous cas très envie de vite le retrouver.