L'histoire :
Dans le port du Havre, en mars 1902, le fameux trois-mâts « le Belem » se prépare à prendre le large à destination de Saint-Pierre de la Martinique. Le nouveau capitaine Chauvelon fulmine : le journaliste qu’il doit prendre à bord est en retard et risque de lui faire louper la marée. Martin Delapierre, casque colonial sur la tête, arrive juste à temps. Il se fait appeler Arthur et doit se mettre très vite à la discipline maritime imposée par Chauvelon. En plus de 50 jours de traversée, Delapierre a le temps d’apprendre les rythmes et les rigueurs de la vie à bord du « yacht nantais »… et de se faire finalement apprécier du capitaine. Enfin, le 7 mai 1902, le Belem accoste en rade de Saint-Pierre. D’obscurs nuages sombres viennent ternir le climat tropical et les charmes du « Petit-Paris », auxquels l’équipage rêvait depuis le départ. En effet, la montagne Pelée gronde, fume, menace et d’aucuns parlent d’une éruption imminente. Pourtant, les politiques locaux minimisent les risques : vivre à proximité du danger accoutume à ignorer les humeurs du volcan. En outre, ce ne sont pas quelques grondements et misérables fumerolles qui vont perturber la campagne électorale du député local, ni remettre en cause l’autorité du gouverneur de l’île ! Au service des douanes, une mauvaise nouvelle attend le capitaine : il n’y a plus de place au mouillage en rade de Saint-Pierre avant une semaine : le voilier doit partir accoster au havre du Robert, à plus de 25 km sur la côte est. Tandis que le journaliste Delapierre est débarqué, l’équipage relève le gréement à contrecœur…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La série le Belem, coéditée par Glénat et le magazine Chasse-Marée, est désormais prévue pour couvrir quatre tomes. Quatre histoires complètes, imaginant des aventures empruntes d’embruns dans des contextes maritimes et historiques distincts, mais authentiques. Si on retrouve initialement le bosco et le Vern, deux protagonistes déjà présents au tome 1 (situé chronologiquement 6 ans auparavant), ces derniers sont vite relégués au rang de second couteau. Le cœur du récit se concentre évidemment sur la tension croissante liée aux risques d’éruption de la montagne Pelée, ainsi qu’au atermoiements décisionnels et négligences politiques locales. La première planche rappelle les faits : l’épisode tragique de l’éruption du mont Pelée a eu lieu le 8 mai 1902, au petit matin. Apocalyptique, cette catastrophe naturelle est restée dans les mémoires comme l’une des plus dévastatrice du XXe siècle : une nuée ardente avoisinant les 800°C a dévalé la pente du volcan à plus de 600 km/h, rasant Saint-Pierre et anéantissant ses 28 000 habitants ! Selon la légende, on ne dénombra qu’un seul survivant : un bagnard protégé par les épais murs de son cachot. Le récit ici romancé par Jean-Yves Delitte ne retient toutefois pas cette anecdote : le propos focalise avant tout sur des campagnes du Belem à différentes époques. En ce sens, l’auteur complet Delitte fait mouche, multipliant avec une extrême minutie et une spontanéité réaliste rare les points de vue détaillés sur le navire, ainsi que le vocabulaire et les expressions maritimes idoines. Une fois de plus, ses cases proposent un grand spectacle visuellement époustouflant, avec toujours le même petit bémol : la récurrence des faciès des personnages. L’auteur assume même tellement ce parti pris graphique, qu’il accorde au nouveau capitaine (Chauvelon) strictement les mêmes traits et le même caractère de cochon que celui du tome 1 (Lemerle) ! Pas de quoi bouder le plaisir d’une lecture une nouvelle fois enthousiasmante…