L'histoire :
Les rêves d'Ally sont un déferlement de violence insupportable, une suite de scènes hallucinantes dans lesquelles ses proches sont massacrés par une sorte de sauvage muni d'une massue fracassante. Lorsqu'elle se réveille, ce matin-là, la jeune fille se rue dans le bureau de son père... pour le découvrir mort sur son fauteuil, la poitrine transpercée. Les funérailles sont rapidement suivies d'une enquête qui ne doit épargner personne. Les membres de la famille sont également soupçonnés, si bien qu'Ally se trouve menacée des foudres de la justice si elle continue de vouloir fouiller dans le bureau de feu son père. Elle insiste pourtant et attend que tous aient quitté la maison pour forcer un tiroir fermé à clé. Elle y découvre alors, dans un carnet secret, qu'elle est en réalité une fille adoptive, et que non contents de lui avoir caché cette vérité, ses parents lui ont également dissimulé l'existence de Carry, sa sœur jumelle. Son père Charles Herbert Hugh était un scientifique de renom, auteur d'une théorie novatrice sur l'éducation et la descendance. Pour prouver le bien-fondé de ses convictions, il n'a pas hésité pas à initier avec Ally et Carry une expérience révolutionnaire et cruelle...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans un registre visuel steampunk un peu déjanté, Ignacio Noé propose, en tant qu'auteur complet, une série originale qui donne libre cours à sa fantaisie graphique. L'album démarre par une scène hallucinante et ultra nerveuse de cauchemar réaliste, qui explose littéralement au visage du lecteur. L'énergie de Noé est unique, elle parsème son travail de scènes marquantes et colorées, qui sont le cœur de son récit. Le reste de cette histoire souffre d'une certaine volonté d'en faire trop, et fait passer un peu vite ses personnages de l'accablement à l'action. Ally semble effectivement particulièrement forte face à tous ces morts dans sa famille, tandis que les personnages autour d'elle restent vaguement goguenards, voire souriants, sans raison apparente. L'auteur fonce sans reprendre son souffle pour faire avancer son intrigue, rattrapant parfois le temps avec des pages soudain lourdement chargées en dialogues explicatifs. En revanche, les prodiges visuels du dessinateur sont nombreux, notamment lorsqu'il dépeint le panorama du Colisée de Londres, ou lorsque son héroïne se dénude dans un rêve aux dimensions magiques. Il montre une personnalité graphique réelle, à mi chemin de Frank Pé et de Gibrat, qui devrait lui permettre de poursuivre sa carrière dans des créations visuellement exigeantes.
