L'histoire :
Une équipe de journalistes télévisés fait un reportage chez le célèbre collectionneur de vin Jean Poitou, réputé pour avoir la plus belle cave du monde. Des milliers de millésimes, des grands crus, de toutes tailles et de toutes années, sont ainsi entreposées dans une cave surveillée par des caméras, derrière une porte blindée. Il est toutefois déconseillé d’accuser Poitou d’être un spéculateur, plutôt qu’un vrai amateur… Car alors, l’œnologue monte sur ses grands chevaux. Face caméra, il avoue même être en train de s’endetter pour acheter le dernier millésime de Bordeaux et ainsi poursuivre de cohérente façon sa collection, justement à cause des spéculateurs. Entendant cette supplique à la télé, l’oligarque russe Youri Changnomov rend visite à son concurrent pour lui proposer une association. Mais Poitou ne supporte pas cet escroc arriviste et il l’envoie au diable. Les jours suivants, trois hommes baraqués et cagoulés débarquent chez Poitou en camionnette pour le dévaliser. Mais Poitou préfèrerait mourir plutôt que de donner l’accès à sa cave. Les colosses repartent donc avec des caisses de « vin de tous les jours » entreposés ailleurs. Cette affaire met cependant en alerte la presse. Parmi eux, se trouvent Antoine et Julien, deux journalistes au sein d’une revue spécialisée dans le vin. Ils arrivent chez Poitou en plein buzz médiatique et assistent en direct à un curieux attentat au cocktail Molotov sur un véhicule…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ces dernières années ont permis d’étonnantes accointances entre la bande dessinée et le vin. Entre autre, Les fondus de chez Bamboo font du gag, Etienne Davodeau se transforme en vigneron (Les ignorants) et Corbeyran déroule une saga familiale façon Glénat avec Châteaux Bordeaux. Chez ce dernier éditeur, voici un p’tit « polar à papa » en one-shot, scénarisé par Laurent Panetier. En guise de châssis narratif, ce dernier s’appuie sur une solide documentation du milieu viticole : les termes et clins d’œil sont précis, parfois complétés par des précisions en bas de page. Le duo de journalistes spécialisés qu’il met en scène enquête sur une rivalité musclée et légèrement tarabiscotée entre collectionneurs de vins. Ici, les personnages sont aussi caricaturaux – l’odieux oligarque russe, le collectionneur fétichiste, le tandem de journalistes l’un naïf, l’autre perspicace – que les faits. Mais cela est cohérent avec le ton et le registre graphique. Georges Van Linthout déroule en effet le même trait entre ligne-claire et semi-réalisme que pour les enquêtes de Brian Bones dans le milieu des vielles voitures (au côté de Rodolphe). Quant à conjuguer le vin et les voitures, les auteurs prouvent à juste titre qu’il est fortement déconseillé de boire ET conduire. Sans être un cru exceptionnel, ce polar se révèle comme un vin de table fort appréciable, pour tout-public.