L'histoire :
Marqué par un passé sombre en tant que second sur un navire négrier, le vieux loup de mer Kernok aspire à plus d'aventures. Profitant de la guerre qui fait rage entre l'Angleterre et la France, il propose au capitaine de transformer leur navire en corsaire, une idée qui lui permettrait de mêler commerce et piraterie. Face au refus catégorique de son supérieur, le pirate, poussé par une soif de liberté et d'indépendance, précipite les événements. Un soir d'ivresse, un léger coup de pouce suffit à envoyer le capitaine par-dessus bord. La Providence, ou plutôt la détermination de Kernok, vient de lui ouvrir les portes de la piraterie. À la tête de son équipage, il sillonne les océans, à la recherche de butin et de combats. Pourtant, malgré sa vie de pirate, le corsaire n'est pas insensible aux sentiments. Sous l'influence de l'amour, il décide de consulter une sorcière réputée pour ses visions. La prophétie est sans appel : sa mort est proche. Loin de se résigner, Kernok décide de vivre chaque instant avec intensité. Il reprend la mer, plus déterminé que jamais à savourer les plaisirs de la piraterie. Après un dernier coup d'éclat, s'emparant d'un navire richement chargé, il célèbre sa victoire avec son équipage. Mais la menace de la mort plane constamment sur le vieux loup de mer. Entre croyances, superstitions et actes de piraterie violents, le héros navigue vers un destin auquel il ne peut échapper.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Adapté du célèbre roman d'Eugène Sue paru en 1830, Kernok le pirate plonge le lecteur dans un univers maritime sombre et violent. Le scénariste Frédéric Brrémaud dresse le portrait d'un anti-héros complexe : Kernok, un vieux loup de mer cynique et opportuniste. Loin d'être motivé par des idéaux humanitaires, ce dernier souhaite mettre fin au commerce d'esclaves uniquement pour s'enrichir plus rapidement en devenant corsaire. Avec une telle noirceur d'âme, Kernok incarne à la perfection le stéréotype du pirate sanguinaire assoiffé d'or et de pouvoir. Pourtant, si le récit s'inscrit dans les codes du genre, il manque d'une originalité véritable pour se démarquer. Le suspense est principalement porté par la prophétie d'une vieille sorcière qui annonce une mort imminente à Kernok, créant une épée de Damoclès qui plane constamment sur le personnage. L'environnement graphique, confié à Alessandro Corbettini, est complexe. Son trait noir et blanc, sombre et atmosphérique, plonge le lecteur dans une ambiance maritime profonde et mystérieuse. Les planches sont travaillées à l'encre de Chine ce qui permet de créer des textures et des nuances très riches, mais elle rend également le dessin plus complexe à appréhender. Effectivement, le style de l'auteur peut dérouter les lecteurs peu habitués au réalisme cru. Il est important de noter que ce style très personnel est aussi une force. Corbettini parvient à créer une ambiance unique et immersive, qui transporte le lecteur au cœur de son univers. En somme, l'histoire est bien construite avec des personnages attachants dans leur noirceur. Néanmoins, l'œuvre manque aujourd'hui d'une véritable originalité pour se démarquer. Si le scénario adapté est classique, le dessin de Corbettini apporte une touche personnelle et artistique indéniable. Il est clair que le dessin fera l'objet de discussions et d'interprétations différentes. D'ailleurs n'est-ce pas le but recherché de tout travail artistique ?