L'histoire :
Des chinois sont en train de se noyer en pleine mer. Ils sont jetés par-dessus bord et l’armada aux voiles rouges continue sa route sans se soucier de ces hommes. Certains meurent, d’autres arrivent à nager jusqu’à la terre proche. C’est du désert à perte de vue. Epuisés mais sauvés, les jeunes gens se reposent sur la plage, mais ils sont rapidement attaqués par une bande de nomades chargeant sur leur chameau. Le soir, autour du feu, le sergent Fei Wong se renseigne pour savoir ce qu’il va advenir d’eux. Le jeune homme parle l’arabe, ce qui facilite les échanges. Le chef des nomades lui apprend qu’ils vont être amenés au marché d’Assouan pour y être vendus comme esclaves. Le lendemain, Fei Wong explique à Massin, le chef des nomades, qu’il a été jeté par-dessus bord car il était malade et que son capitaine, craignant une épidémie, s’était débarrassé de ses hommes. C’est son meilleur ami qui l’a trahi. Entre les deux hommes, les discussions vont bon train. Fei Wong ne comprend pas que, chez les nomades, la femme puisse être l’égale de l’homme et prendre part aux décisions du logis. Après plusieurs jour de marche dans le désert, Fei Wong et son ami Jin tentent de s’échapper avec quelques camarades, mais ils sont vite repris. A Assouan, ce sont les hommes du sultan qui font leur acquisition, à lui et Jin. Ils seront formés avec les mamelouks, pour devenir eunuques.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Michaël Le Galli, directeur de la collection J’ai tué, est un touche à tout. Le libraire scénariste le démontre ici une nouvelle fois avec une histoire qui sent bon l’orient, et qui nous emmène doublement loin. Doublement, parce que le héros est un militaire chinois du XVème siècle. Mais aussi parce que ce militaire, échoué en Mer Rouge, se retrouve vendu comme esclave au sultan du Caire. Les européens modernes que nous sommes se retrouvent confrontés à des peuples nomades qui mettent la femme sur un pied d’égalité par rapport à l’homme, 5 siècles avant nous, une paille. Mieux, le sultanat mamelouk du Caire est à l’époque dirigé par des Circassiens, blonds aux yeux bleus venant directement du Caucase. Ça pique un peu les yeux, mais ça fait bouillir les petites cellules grises. L’histoire, quant à elle, fonctionne : ce jeune chinois, guerrier émérite, tape dans l’œil de son instructeur qui veut en faire un eunuque, privilège rare, mais coûteux. D’autant plus que Fei Wong est marié en Chine, et veut retrouver sa femme et l’enfant qu’il n’a pas vu naître et qu’il espère être un garçon… Ça rebondit, ça ourdit, ça trahit, on se croirait dans Angélique et le Sultan, sans les jérémiades de Michèle Mercier. C’est efficace en diable. D’autant que pour mettre tout cela en image, le roué breton a choisi un jeune dessinateur italien, Cristiano Crescenzi, dont la ligne claire, déjà affirmée, donne beaucoup de mouvement à la narration, avec une belle profusion de cadrages originaux et de plans bien sentis. Les couleurs de son compatriote Filippo Rizzu, qui sévit aussi notamment sur la série Roma, sont agréables et renvoient à l’âge d’or de la bande dessinée par moments. Résultat : ce premier tome se boit comme une petite bière et on attend avec impatience le deuxième, qui devrait emmener le héros à Venise, dès le joli mois de mai.