L'histoire :
Dans un musée de Londres en 1983, un écrivain au passé de militant communiste et un espion russe se sont donné rendez-vous. Au cœur de leur échange, des photos prises par Tina Modotti, inédites et très rares. La photographe a perdu toutes les traces de son art à Mexico plus de 40 ans plus tôt. Les deux hommes évoquent les souvenirs de la république espagnole avant la guerre et l'avènement de Franco. Les grands noms de l'époque, Pablo Neruda et Aragon, leur comportement dans la vie privée parfois très contradictoire avec leur image. L'écrivain n'est autre que Jorge Semprun, ancien cadre du parti communiste espagnol qu'il a quitté quelques années plus tôt, et écrivain célèbre. Il va se plonger dans le passé de cette jeune femme qui a quitté l'Italie au début du siècle, une femme fabuleusement belle qui ignore encore le destin extraordinaire qu'elle va se construire. Une première rencontre avec un peintre qui va l'emmener aux Etats-Unis, et de premières rencontres avec les milieux révolutionnaires. Ses contacts sont mexicains et militants communistes, ils sont au cœur de la lutte contre le dirigeant cubain, et elle découvre les conséquences de la rivalité entre stalinistes et trotskistes. L'un de ses premiers amants sera assassiné à Mexico en 1929, soi-disant par un représentant du pouvoir cubain. Semprun se plonge alors dans cette vie fascinante aux côtés de grands artistes et au cœur des grands évènements de l'époque, une vie qui lui rappelle la sienne.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Très intéressant, très érudit et un peu confus, c'est le pitch après lecture de cette plongée étonnante dans l'univers des militants communistes à travers le monde, lorsque le stalinisme était à son apogée. En choisissant le point de vue d'un écrivain célèbre et en s'appropriant son recul sur sa propre jeunesse, Jean-Pierre Pécau nous prévient d'entrée de jeu que son album ne sera pas manichéen. Et en effet, il réussit à mélanger les sentiments authentiques, les ambitions révolutionnaires, le contexte politique et historique, et parfois les sombres contours de l'âme humaine. La découverte du personnage de Tina Modotti est aussi un des intérêts de ce récit foisonnant, elle incarne une sorte d'icône de l'engagement, de muse pour de nombreux militants, et d'artiste parmi d'autres qui ont choisi de plonger dans la lutte. L'intrigue double de sa propre vie au milieu des grands évènements, qui l'emmène du Mexique à l'Espagne et d'un homme à l'autre, est un ressort classique de scénariste. Pécau s'en sert avec le métier qu'on lui connait, comme de la technique du flashback. La profusion de personnages que la jeune femme va croiser est cela dit un peu pesante, avec une volonté apparente de n'oublier personne, quitte à bombarder le lecteur. Au dessin, Jandro Gonzalez s'emploie à animer de très nombreux dialogues et crée des personnages aux profils romantiques et aux sourcils presque toujours froncés. Une plongée éclairée dans l'histoire, qui met habilement en avant les contradictions apparemment inévitables auxquelles sont confrontés ceux qui s'engagent totalement.