L'histoire :
Au crépuscule de la première guerre mondiale, Piet Mondrian est en Hollande, son pays natal, pour assister son père souffrant. Mais son cœur est ailleurs, loin de l’apathie batave. Son cœur est à Paris, dont les formes rectilignes, le parfum et l’énergie lui sont essentielles, inspiratrices. Le peintre est en effet las des portraits, las des courbes de la nature, las du vert… 1920, deux ans plus tard dans la ville lumière qu’il désirait tant revoir, l’artiste danse le quickstep ou le charleston au son des musiques des années folles. Il aime ça, guincher. C’est d’ailleurs au détour d’un cabaret qu’il rencontre la belle et pétillante Francine, avec laquelle il partage quelques pas avant de s’éclipser sans mot dire. Mais, par le biais d’un « drôle » de hasard, ils se retrouvent et décident de se revoir au Petit Cheval pour gambiller de nouveau au rythme du swing de l’orchestre. Les corps et les cœurs se rapprochent, mais Mondrian est imperméable à l’amour. Il ne le souhaite pas. Il veut consacrer l’ensemble de sa personnalité à son art. Pour « l’amour », il y a les filles du quartier Montparnasse, elles lui siéent parfaitement. Francine est désabusée, mais ne renonce pas à éroder l’herméticité de Mondrian, un artiste obstiné et obsédé par son œuvre en devenir…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La fleur dans l’atelier de Mondrian est un titre plus anecdotique que réellement évocateur du contenu de ce beau roman graphique. En effet, même si la fleur est un fil conducteur du récit, elle est surtout celle qui aurait permis à Jean-Philippe Peyraud et Antonio Lapone de monter le projet. Il est dit que les deux hommes avaient sur leurs tables de travail respectives la même photo d’une fleur en plastique dans l’atelier du peintre et que celle-ci aurait inspiré la trame très (trop ?) romancée de l’ouvrage. Les années parisiennes de Mondrian, telles que racontées ici, prennent parfois des airs de déjà vu dilués dans de l’eau de rose. Peut-être manque-t-il des éléments antérieurs à la période narrée pour mieux comprendre la profondeur du personnage et ce qui l’habite. Car oui, la force de cet ouvrage tient surtout dans son rythme qui reflète parfaitement la ferveur du Paris des années 20, et dans sa mise en page (inévitablement) très quadrillée. Il n’y a pas à tergiverser, le trait est superbe, unique. Le dessinateur italien a su parfaitement réutiliser les couleurs primaires très denses de Mondrian pour mettre en avant chacun de ses personnages féminins principaux. Un carnet de croquis et d’études de 40 pages permettent d’ailleurs de se faire une idée du travail exceptionnel réalisé en amont par Antonio Lapone. L’œuvre de Mondrian ne laisse pas grand monde insensible. On l’aime, on la déteste. Le roman graphique de Peyraud et Lapone, du fait de l’intensité discutable de son scénario, provoquera peut-être chez certains un sentiment plus mitigé… Mais il n’en vaut pas moins le coup d’œil.