L'histoire :
Siegfried Wolinski, juif errant venu de Pologne, tombe amoureux d'une petite juive italo-tunisienne, Lola Bembaron. Ils se marient en 1928 en Tunisie, alors sous protectorat français. Georges Wolinski naît en 1934 à Tunis. Il n'a pas le temps de connaître son père, car ce dernier est assassiné par l'un de ses employés en 1936. A la suite de ce drame, Lola part en France. Georges est confié à ses grands-parents maternels qui vont l'élever en compagnie de ses oncles et tantes comme leur fils. Georges garde un excellent souvenir de cette période. Il se rappelle avec nostalgie du vendredi soir où toute la famille se réunissait autour du couscous. C'était une fête à chaque fois ! L'été, tous le monde passait 2-3 mois au bord de la mer. C'était une véritable épopée avec les lits, les armoires portées par la haraba (charrette) traînée par des chevaux. Il se souvient aussi qu'à l'âge de 9 ans, sa grand-mère l'a emmenée au hammam avec sa sœur et sa cousine. L'ambiance, la beauté des corps à l'ancienne avec des seins et des hanches, pas des maigrichonnes comme maintenant. Des images qui l'inspireront quand le dessin nourrira sa vie d'homme...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Deux ans déjà que Wolinski a été assassiné en compagnie de ses amis de Charlie Hebdo Cabu, Honoré, Tignous, Charb... Le deuil est douloureux pour sa famille. Sa femme a écrit un livre sur leur belle histoire d'amour (Georges avait pour habitude d'écrire des mots doux sur post-it et de les placer un peu partout dans leur appartement). Sa fille a publié des textes remplis d'émotion sur la relation magique qu'elle avait avec son père. Aux dires de tous, Georges Wolinski était une belle personne pleine d'humour (« Je m'appelle Georges. Mon histoire est émouvante parce que je l'ai arrangée, sinon elle ne serait que sordide »). On s'en aperçoit dès les premières pages de cette autobiographie dessinée et rythmée par les innombrables dessins de l'auteur et les textes de Virginie Vernay. Ça respire le bonheur et la joie de vivre, malgré la tragédie : sa première femme Kean est morte dans un accident de voiture, le laissant veuf avec ses deux filles. C'est à la suite de ce drame que Wolinski, dessinateur chez Hara-Kiri, change de style, délaissant son trait classique pour le croquis quick drawings (il était fan du dessin à l'américaine découvert dans les revues des GI's présents en Tunisie en 1943). La puissance de l'amour reprend alors le dessus quand il rencontre Maryse deux ans plus tard. La carrière du dessinateur se lance. Wolinski, c'est le dessinateur-phare des années 70-80 avec des femmes à poil. Taxé de misogyne ou d'homme à femmes, il était surtout amoureux des femmes (il n'a eu que des filles, d'ailleurs). De là où il est, il doit bien rigoler. A noter en fin d'ouvrage, la lettre émouvante de sa fille Elsa. Une autobiographie à la force émotionnelle intense !