L'histoire :
A New York en 1887, se présente dans un hôtel une jeune femme nommée Nellie Brown : elle souhaite y réserver une chambre et un repas. Mais lorsqu'elle pénètre dans les salles communes, ses réactions vont intriguer, alerter... et inspirer la crainte ! En effet, elle se sent observée et persécutée par les gens qui l'entourent, et elle répète inlassablement qu'elle recherche des « troncs ». Les femmes de l'hôtel vont se moquer de cette folle, ou lui tourner le dos par peur des représailles. Une seule va lui tendre la main, l'accompagner du mieux qu'elle peut. Il ne faudra pas longtemps avant que la police l'embarque, et qu'elle rencontre des médecins. Elle se fera rapidement interner dans un hôpital psychiatrique de New York. Nellie n'aura pas dû trop abuser de ses talents d'actrice pour pénétrer dans cet endroit sordide et peu avenant : la journaliste a réussi avec une facilité plutôt déconcertante à atteindre son objectif : se faire interner. Maintenant, elle est bien décidée à récolter des témoignages, à vivre cette expérience de l'intérieur, à mettre son corps et son esprit à l'épreuve, pour montrer les conditions déplorables d'accueil de ces femmes dans les asiles. Elle y découvrira les horreurs qui y sont commises, des choses qu'elle n'aurait pu soupçonner et prendra des notes pour écrire un article solide dans un journal renommé, afin de dénoncer, pour, elle l'espère, faire changer les choses et éveiller les consciences...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cette nouvelle bande dessinée retrace une partie de la vie de l'une des pionnières du journalisme d'investigation : Nellie Bly. L'ouvrage s'intéresse cependant à une enquête en particulier, l'une des plus marquantes de sa carrière. Afin de pouvoir écrire un article pour un célèbre journal, Nellie en effet s'est faite interner de son plein gré, en laissant supposer qu'elle était folle, pour pouvoir observer ce qui se déroule derrière ses murs, et écrire un papier choc et avéré. Deux adaptations en bande dessinée de la vie de cette femme, ont déjà été produites l'année passée, l'une par Steinkis, l'autre par Soleil. C'est donc une troisième version qui nous est proposée ici par Glénat, peut-être l'une des plus abouties sur le plan scénaristique et graphique. Nous sommes plongés dans les entrailles de cet asile psychiatrique, nous sommes témoins des horreurs qui s'y déroulent, impuissants, comme l'était la journaliste. Le scénario est façonné d'une telle manière, que si nous ne connaissons pas l'histoire de Nellie Bly, nous ne pouvons pas réellement deviner qu'elle feint d'être folle, sur le début du récit. Elle n'aura d'ailleurs aucun mal à convaincre les personnages qui l'entourent de sa prétendue folie. Lorsque nous comprenons les véritables enjeux, nous percevons les choses différemment : nous sommes plus attentifs aux réactions des médecins, des infirmières... et cela est encore plus percutant ! Au XIXème siècle, la condition féminine était bien peu de choses, et les témoignages des femmes que rencontrera Nellie Bly en seront le reflet. Décidée à lutter contre les inégalités, quelles qu'elles soient, en rétablissant la vérité à travers l'écriture, elle révolutionnera le journalisme, et œuvrera notamment pour des avancées féministes et ouvrières. Ce morceau de vie choisi a été très bien adapté à travers les textes, mais aussi à travers l'image par la talentueuse Carole Maurel (Jeannot, L'apocalypse selon Magda, Ecumes). Elle choisit de mettre en lumière les visages, les expressions, pour apporter de la crédibilité et de l'émotion, mais aussi mettre en avant le personnage de Nellie à travers la couleur violette. Cette couleur permet de l'identifier en dehors de l'asile. Mais lorsqu'elle se mélange aux femmes internées, elle perd son humanité, ce qui la caractérise, et la couleur s'estompe.