L'histoire :
Tout fout le camp et la société va mal : c’est la crise même dans l’aviation, le service militaire va être supprimé, les immigrés sont renvoyés, les réveillons ne sont plus ce qu’ils étaient, les églises perdent des fidèles, les pauvres ne font que copier les riches, les caravanes polluent la circulation, la police souffre de son image… Pour résoudre tous ces problèmes du quotidien, rien de tel que des idées folles : on baise pendant le jour de l’an, on créé des piscines à l’Eglise, on tue les riches pour que les pauvres ne copient plus, on gerbe et on chie dans les caravanes… On vit une époque formidable.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Jean-Marc Reiser a été un des premiers auteurs irrévérencieux du 9ème art. Après avoir sévi sur des journaux corrosifs comme Pilote, Hara Kiri, Charlie Hebdo, Reiser a publié ses productions au format BD. Ici, l’humour est extrêmement moderne et profondément choquant : Reiser ne s’interdit aucune provocation et tape partout et tout le monde avec un humour féroce. Dans cet opus, toute la société française est représentée : du bas peuple aux grands bourgeois, des handicapés aux racistes, des ouvriers aux CRS, des animaux aux touristes, des curés aux putes, des militaires aux hippies, des vieillards aux enfants… Reiser se plait à brosser le tableau d’une société dans son ensemble, dans toutes ses contradictions et sa bêtise crasse. Pour cela, il se sert de l’humour comme arme de destruction massive : les prêtres pensent à forniquer, les handicapés sont mauvais et grincheux, la police est violente, l’aviation se met à la prostitution pour gagner de la clientèle… A coups de bazooka, Reiser épingle les horreurs d’une société archi individualiste en en présentant ses acteurs ridicules : les gens de toutes origines et de tout corps de métier. Reiser s’attarde sur l’humain pour mieux le caricaturer : tous les Français deviennent affreux, sales et méchants. A la relecture de cette réédition, on pourra être surpris de l’extrême modernité du discours : plus de trente ans avant nous, l’auteur parlait déjà de crise avec des slogans qui rappellent des souvenirs : « Travaillez plus, gagnez moins : le miracle français ». Preuve que le caricaturiste était un visionnaire et que la société qu’il fustige n’a pas beaucoup changé. Alternant mini histoires ou gags satiriques en une case, Reiser ne fait pas dans la dentelle et parle de tous ces sujets avec une liberté étonnante pour l’époque. Le trait rapide et en apparence brouillon est très efficace pour caricaturer notre monde : l’auteur tranche à vif… Ce tome est fait pour les amateurs d’humour très noir et de critiques virulentes et amorales. L’occasion de redécouvrir d’une période de contestation et de rébellion qui crache sans vergogne sur notre temps et notre époque… une époque pourtant si « formidable » !