L'histoire :
On ne va pas vous en raconter, il n’y en a pas. Pornopia est une suite de pages / dessins, saynètes, figées dans le temps comme irréelles. Certaines sont douces et sensuelles, d’autres crues, d’autres carrément dérangeantes. De la simple caresse au fist-fucking en passant par les bondages, fellations et cunnilingus, simple, double pénétration, masturbation, etc. Les scènes sont décortiquées, appréhendées sous différents angles. Le lecteur n’est pas voyeur, il semble faire partie intégrante de la scène. Il n’est pas le regard mais l’œil. Un panorama du porno dans tous ses états, à destination d'un public averti…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Brüno, après sa déclaration d’amour aux séries Z dans Lorna, récidive en s’attaquant à un autre genre de cinéma « bis » : le porno. Ici, pas de parole, ni de scénario. Qui en a jamais voulu, de toute façon ? Les images parlent d’elles-mêmes. À travers une succession de vignettes muettes – de l’ébat « classique » à des scènes parfois très crues –, Brüno rend hommage à ce genre considéré comme mineur, mais réservé aux majeurs. La première de couv est carrément décoiffante. Au sens propre aussi, d’ailleurs. Une femme, nue en talons aiguilles, est assise sur le visage d’un homme. Il est couché, elle se tient les mains sur les hanches. Elle est clairement en position de domination. C’est un choix courageux et transgressif, tant l’image du sexe est souvent loin d’être féministe. Mais ici, même si certaines scènes peuvent égratigner nos chastes yeux, tout le monde est à égalité, et les rares vignettes SM sont étonnamment adoucies par le trait rond et minimaliste de Brüno. Le choix bicolore noir et bleu donne un effet de douceur et d’intimité qui permet de faire accepter certaines scènes un peu rudes et, paradoxalement, rend assez fades d’autres positions plus courantes de la sexualité. Dans tous les cas, le choix de s’attacher à des cadrages quelquefois audacieux, avec des effets de profondeur (si l’on ose dire) est très intéressant. On est quelquefois étonné de sentir le temps s’arrêter sur une image. Les cassures et les courbes sont nettes et hypnotiques, mais c’est clairement un choix du dessinateur, au détriment d’un travail qui aurait été forcément différent, sur les émotions et les visages. On a ici de l’enchevêtrement, de la pénombre et de l’intimité volée. Et c’est déjà pas si mal. Chapiteau, donc.