L'histoire :
1971. La jeune Diane vit avec sa mère à la campagne. Elle aime passer du temps seule dans sa chambre. Depuis sa fenêtre, elle chausse ses jumelles et observe le monument aux morts situé juste en face. Elle note les noms qui sont inscrits sur la plaque commémorative, elle suit les cérémonies qui s'y déroulent régulièrement en hommage aux « morts pour la France ». Dans sa chambre, elle aime aussi coudre. Elle confectionne des poupées de chiffon. En classe, elle est assez solitaire. Elle n'arrive pas à se faire des amis, à trouver des points communs avec les personnes de son âge. Devant elle, elle entend les garçons se vanter de leurs exploits avec les filles. Elle sait qu'ils mentent. Tous. Pour se faire remarquer, pour se faire respecter. Et ils savent le lui rendre : ils se moquent d'elle, n'hésitent pas à la violenter. Quand vient l'heure du cours de sport, elle sait qu'elle entame la partie la plus difficile. Elle n'y arrive pas, elle se ridiculise. Les garçons profitent de l'occasion pour enfoncer le clou. Alors, prise d'une rage féroce, elle affiche ouvertement la vérité qu'ils se donnent tant de mal à cacher et divulgue leurs petits secrets. Tous la prennent pour une folle, qui fabrique des poupées flippantes. En sortant de cours, elle entend une voix qui lui parle et qui lui évite un accident. Aurait-elle un ange gardien ? Alors qu'elle s'arrête à vélo devant le monument aux morts, pour montrer à l'esprit la fenêtre de sa chambre, celui-ci se matérialise devant elle. C'est Hadrien, son arrière-grand-père mort en 1917. Diane est ravie d'avoir un ami et de renouer des liens avec sa famille...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le scénariste Antoine Rocher et l'illustratrice Lilas Cognet proposent un one-shot atypique qui aborde deux grands sujets : celui du devoir de Mémoire et le poids des secrets de famille. Diane est une adolescente harcelée, isolée. Même à la maison, une distance se crée entre elle et sa mère. Alors, lorsque l'esprit de son arrière-grand-père, mort lors de la première guerre mondiale, se matérialise devant elle et lui promet monts et merveilles, elle s'accroche à cet espoir de rétablir la vérité et d'être aimée. Mais petit à petit, elle déchante et lève le voile sur des secrets enfouis depuis des années. Avec subtilité et à travers une histoire fantastique, les auteurs racontent les liens parfois brisés, quelquefois reconstruits, entre les générations ; mais aussi les séquelles que peuvent laisser l'empreinte d'une guerre dans la cellule familiale. Le personnage de Diane est profond, le lecteur sent toute sa détresse, sa colère, son envie de se libérer. On sent qu'elle bouillonne, qu'elle meurt d'envie de crier la vérité ! Graphiquement, Lilas Cognet reprend le même style que dans son album précédent. La colorisation est très marquée, les couleurs sont accentuées au maximum, créant de grands contrastes. Cela peut déstabiliser au premier abord. Pourtant, le trait s'accorde parfaitement à l'histoire. Le style évoque par moments le trait de l'illustrateur Arnold Lobel, auteur du Magicien des couleurs.