L'histoire :
1918. New Jersey. Grace et Mollie arrivent à l’usine et se changent aux vestiaires. Albina appelle Grace Fryer car la directrice, Madame Rooney, veut la voir afin de former une nouvelle arrivante, Edna Bolz, à la technique du marquage aux lèvres, rien de bien compliqué mais surtout de l’habilité pour un rendement de 250 cadrans par jour d’ici la fin de la semaine d’adaptation. La peinture Undark est précieuse, donc chère. La technique est en trois temps : lip, tu lisses le pinceau, dip, tu prends la peinture, paint, tu peins. Comme il faut peindre l’ensemble des chiffres du cadran, il ne faut pas hésiter à lisser plusieurs fois par chiffre le pinceau. L’heure de la pause déjeuner sonne, Edna est ainsi présentée au reste de l’équipe de copines, Katherine, Albina, Amélia et Quinta. Les filles lui demandent si elle s’habitue bien, notamment au goût de la peinture, un goût de ferraille. Certaines filles ont déjà quitté ce poste à cause de cela. Elle rentre maintenant dans le cercle fermé des Ghost Girls…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le radium, élément radioactif découvert par Marie Curie en 1898, a connu un vif engouement. Sa première utilisation a été de rendre lumineux les chiffres des cadrans de pendules sous forme de peinture. La radioactivité apparaît alors comme une source de vie dans les années 20, avant que ses méfaits ne soient reconnus, parfois trop tard, comme le montre la dessinatrice CY dans ce Radium Girls. Elle y décrit à la fois l’insouciance des jeunes filles, qui utilisent la peinture pour se vernir les ongles, enjoliver les robes en soirée, briller (volontairement ou pas...) dans le noir. Et qui travaillent à l’usine, à peindre des cadrans, un travail bien payé mais dont les risques encourus avec la peinture utilisée sont vite étouffés par la direction. Au fur et à mesure, elles commencent à sentir des douleurs au niveau des dents, des articulations, jusqu’à ce que l’une d’entre elles soit emportée. Le scénario est limpide, posant le contexte, la vie quotidienne des filles, les premiers départs, la découverte de la contamination, et ses conséquences, enfin la volonté d’engager un combat… perdu d’avance pour les filles à cet instant, mais qui sera une étape décisive pour les victimes suivantes. Le graphisme choisi, un traitement tout en nuances de violets, à la fois doux et anguleux, hachuré au crayon, et les pleines pages annonciatrices d’un malheur, sont d’une grande émotion. Un bond dans l'histoire de la radioactivité et de ses conséquences directes, plutôt réussi.