L'histoire :
Lorsqu'il arrive à Pékin en 1964, Bernard Prudhon va prendre un poste de comptable à l'ambassade de France. Le régime chinois vient juste d'être reconnu par la France, nous en sommes au tout début de la normalisation avec un pays qui suscite énormément de méfiance dans le monde de l'espionnage. Les premeirs jours du jeune homme plutôt timide ne sont pas très encourageants. Il se rend compte qu'il va être très difficile d'établir des relations normales avec les habitants de la ville, qui se méfient des « longs nez ». Il ne faut pas être vu fréquenter de trop près un occidental, dans un pays qui entame une révolution culturelle aux antipodes des modes de fonctionnement des sociétés occidentales. Pourtant, il va croiser un jeune chinois dans une soirée à l'ambassade, avec qui il va passer un moment passionnant dans un bon restaurant. Xian est un écrivain qui a eu une carrière d'acteur dans son adolescence. Les conversations avec ce nouvel ami cultivé et sympathique vont combler Bernard. Pourtant, vingt ans plus tard, Prudhon sera brutalement interpellé à Paris par des agents du contre-espionnage. Que s'est-il passé pour ce comptable bien loin des secrets d'Etat, pendant ce séjour à Pékin. C'est ce qu'un homme visiblement très bien informé, mais qui va rester anonyme, choisit de raconter au journaliste Patrick Pesnot lors d'un rendez-vous...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avec ce deuxième volume paru simultanément à La Baie des Cochons, Régis Hautière réussit à rendre l'esprit de l'émission de radio dont il s'inspire. Rendez-vous avec X est un programme sur lequel on tombait parfois lors d'un trajet en voiture, le samedi après-midi, avec ce type à la voix grave qui révélait des secrets sur des évènements de l'Histoire contemporaine. Le rythme de cet album est tout à fait raccord, avec cet homme au chapeau qui raconte une incroyable histoire d'espionnage chinois, et les péripéties qui se déroulent sous nos yeux. On n'en revient pas qu'une telle mésaventure ait pu avoir lieu, et le talent de Grégory Charlet est de réussir, d'entrée de jeu, à instiller un doute dans notre esprit, par une habileté graphique épatante. Nous n'en dirons pas plus pour ne pas gâcher le plaisir du lecteur, tout comme nous lui conseillerons de ne pas lire les notes de fin avant les planches elles-mêmes. Charlet adopte par ailleurs un ton graphique réaliste léger et aérien, en laissant ses silhouettes se détacher avec délicatesse sur des décors quasi photographiques. Certes, les décors sont probablement très fortement basés sur des prises de vues réelles, mais ils sont fondus dans une partition graphique très originale faite de couleurs douces et de regards intenses. En moins de 60 pages, les auteurs réussissent à couvrir à la fois l'histoire d'espionnage et sa mise en scène par le fameux Monsieur X. Un beau travail de narration et de découpage, discret et efficace.