L'histoire :
Suite à un phénomène inexpliqué, alors qu’ils faisaient l’amour dans une cave bizarre d’un vieux manoir abandonné, Stanilas et Bertille ont été transportés dans le temps depuis notre présent jusqu’à la fin XIXème. Piégés, psychologiquement perdus, ils doivent en plus affronter des pertes de connaissances et des douleurs de Bertille. Cela dit, ils sont accueillis au sein du manoir où ils se trouvent. Ils font connaissance avec la propriétaire, Sasmira, une jeune femme mystérieuse qui a comme envoûté Stanislas. Une femme plus vieille prénommée Prudence fait office de gouvernante et d’amie de Sasmira. En secret, Prudence leur explique la particularité de Sasmira et semble parfaitement accepter – à défaut de comprendre – la logique de leur mésaventure temporelle. Car Sasmira est une princesse égyptienne âgée de 4300 ans ! Elle « pâtit » de cette immortalité depuis que son père, le pharaon Pepi II, l’a condamnée à demeurer muette en lui fixant un bâillon métallique sur le visage durant une quinzaine d’année. Il voulait l’empêcher de révéler au monde ce qu’elle avait vu lors d’une expérience de mort imminente, c’est-à-dire… rien. Strictement rien. Selon Sasmira, les dieux égyptiens sont un fantasme, le ciel est vide, les promesses de l’au-delà sont toutes des mensonges…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
L’aventure ésotérique et romantique Sasmira a débuté en 1997, sous les stylos et les pinceaux de Laurent Vicomte. 14 ans plus tard, alors qu’on ne l’attendait plus, la suite a enfin vue le jour, sous les pinceaux de Claude Pelet. Il aura encore fallu attendre 5 ans pour que ce troisième tome paraisse, cette fois dessiné par Anaïs Bernabé. Dans sa trame, la fresque de Vicomte propose une réflexion sur la mort, l’amour et le rapport au temps… il y a finalement une certaine cohérence à ce que cette timeline chaotique s’étende au rythme éditorial de la série, bien en dehors des repères habituels. Et il faudra encore attendre pour le prochain volume, car visiblement, l’aventure n’est pas terminée ! Elle se fait cependant tout à fait explicite (une qualité rare, dans le registre ésotérique) quant à la logique du destin de Sasmira, Bertille, Stanilas et Prudence. Tout se joue finalement autour de ces 4 protagonistes, en huis-clos dans un manoir du XIXème, à l’exception des longs flashbacks nécessaires à lever la lumière sur la mécanique ésotérique prenant racine sous l’Egypte antique. L’une vieillit plus vite que la normale, l’autre est immortelle depuis 4300 ans… et Stanilas doit supporter d’être aimé par deux femmes ravissantes et distinguées (dur !). Un fantasme pour beaucoup de lecteurs… qui joue dans l’attachement (et la patience) qu’ils accordent à la série. Une scène presque érotique transcende d’ailleurs le volume à mi-chemin, lors d’un effeuillage pour le moins minutieux. Car le dessin réaliste d’Anaïs Bernabé fait honneur au niveau de virtuosité de ses deux prédécesseurs. Le chara-design est d’une continuité irréprochable, tandis que le décorum conserve lui aussi toute sa splendeur, un surcroit de luminosité en prime. En marge de son caractère romantique ou de ses implications fantastiques, le scénario de Vicomte véhicule aussi des sensations qui font sens, reliant le vide de la mort, le temps qui passe et la puissance de l’amour. On ressort toujours un peu troublé d’un album de Sasmira, et cette émotion est un puissant atout pour patienter jusqu’au prochain tome. Rendez-vous avec Eros et Thanatos sine die pour la suite…