L'histoire :
Fils d'un diplomate français marié à une vietnamienne, le jeune Jacques Vergès a grandi dans un milieu modeste. Le décès précoce de sa maman va le restreindre à une famille monoparentale. Avec son frère, il grandira sous le jouc d'un père devenu médecin et communiste et pour qui l'argent deviendra une phobie. Au cours de son enfance, il apprend à grandir dans l'adversité et à affronter l'humiliation du colonialisme à Madagascar. C'est sans doute ce qui lui permet de se forger une personnalité qui l'aidera dans sa quête à défendre les hommes et les causes qu'ils portent et qui sont pourtant indéfendables. JacquesVergès a défendu l'ancien officier nazi Klaus Barbie ou même le Front de Libération Nationale, un parti politique algérien dont les coups de force pour libérer l'Algérie de la France ont été aussi nombreux que sanguinolents. Il épouse la poseuse de bombes Djamila Bouhired avec laquelle il aura deux enfants. A l'indépendance de l'Algérie, il prend la nationalité algérienne et s'installe à Alger, où il devient chef de cabinet d'un ministre. Au travers de ses positions politiques radicales, Jacques Vergès ne cesse de provoquer le conformisme de la bonne pensée. C'est cela qui guidera une carrière d'avocat controversé, qui a sévi dans des procès particulièrement médiatisés.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Jacques Vergès était un avocat sulfureux qui aimait repousser les limites du possible en défendant des causes indéfendables. Sa connaissance du monde et ses nombreuses escapades en Afrique et en Asie lui ont permis de côtoyer de nombreux dictateurs et de nourrir quelques sympathies particulières. Il a notamment défendu l'ancien dictateur malien Moussa Traoré et on lui a prêté de nombreuses connivences avec les Khmers Rouges, puisqu'il rallia les thèses maoïstes. Il a ainsi défendu ou soutenu Klaus Barbie ou Mao Zedong. Dans le récit de sa vie qu'il conte au journaliste Jean-Charles Chapuzet, on sent une incontrôlable envie de se mettre en scène pour défendre des causes authentiquement sincères et pour lesquelles l'avocat n'élude pas ses convictions. Si on est frappé par l'authenticité du narrateur, on n'apprend cependant rien de très nouveau sur son parcours de vie. Il disparut notamment des radars pendant plus de 8 ans. Le dessin de Guillaume Martinez est chirurgical et précis. Il joue des couleurs sombres et du jaune pour marquer les retours en arrière et narrer la jeunesse de l'avocat. On est aussi frappé par l'exactitude des détails qui l'entourent. La fumée de son cigare et le bureau désordonné dans lequel il se raconte restent des marques indélébiles qui permettent de cultiver cette personnalité éternellement provocatrice. Le roman graphique aura pour vocation de remettre en lumière un avocat plus attaché aux aspects humains de ses clients qu'aux conséquences des actes qu'ils ont commis pour défendre des causes parfois abjectes.